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David Mourey

  • : Démocratie Economie et Société
  • : David MOUREY Professeur d'Economie Auteurs de nombreux ouvrages d'économie chez De Boeck Fondateur des « Rencontres économiques » depuis 2005.« Rencontres économiques lycéennes » et « Rencontres économiques citoyennes »à Pontault-Combault depuis 2005 ! Fondateur des« Rencontres économiques » à Paris depuis 2008 !
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Le Livre de la Semaine

 

 

Texte Libre

 

22 février 2007 4 22 /02 /février /2007 17:00
 Compte rendu de la conférence du mardi 9 janvier 2007
Pontault-Combault, salle Jacques BREL entre 10 h et 12h
 
Pierre CAHUC
Professeur d’économie, Université Paris I-Panthéon-Sorbonne
 
Le fonctionnement du marché du travail expliqué aux élèves
 
Support de travail proposé aux élèves
 
« Le chômage : fatalité ou nécessité ? »,
Flammarion, avec André Zylberberg. 197 p, Flammarion, Paris, 2004.
 
_________________________________________________________________________________________
 
D’une analyse statique du marché du travail à une analyse dynamique
 
En France, en moyenne, chaque jour 10 000 emplois sont détruits et 10 000 emplois sont crées, chaque jour 30 000 personnes perdent leur emploi et 30 000 personnes trouvent un emploi. Les réallocations de main d’œuvre sont deux à trois fois plus nombreuses que les réallocations d’emplois en raison des démissions volontaires de salariés et de départs à la retraite sans qu’il y ait destruction d’emploi, mais simplement rotation de la main d’œuvre. De surcroît, en moyenne, une entreprise qui crée un emploi embauche trois personnes et en licencie deux, la suppression d’un poste de travail s’accompagne de deux embauches et de trois départs/licenciements.
 
La croissance économique est le produit d’un double processus où création et destruction d’emplois sont en interaction avec divers autres mouvements de main d’œuvre. Ce double processus reflète le libre choix des entreprises et des salariés.
 
L’ampleur des mouvements observables sur le marché du travail (MT) conduit un à profond renouvellement de la conception de son fonctionnement. Ce n’est que vers la fin des années 1980 que les économistes ont pris conscience que le MT fonctionne dans le cadre d’un processus de destruction créatrice (PDC). Le développement de l'informatique a rendu possible l'exploitation de millions d'observations révélant l'ampleur du PDC d'emplois et ses liens avec la croissance par la médiation des gains de productivité induits.
 
Sans ce PDC nous n'aurions jamais connu la croissance économique. « La prospérité provient des réallocations d’emplois.» Les innovations y jouent un rôle moteur et leurs effets sont puissants, si le fonctionnement du MT permet le PDC d'emplois, c’est-à-dire les réallocations d’emplois.
 
Mais, si le PDC apporte la croissance économique, il apporte aussi le chômage et des inégalités criantes. Croissance et chômage sont co-déterminées par le PDC.
 
La mondialisation du commerce international joue un rôle marginal. Elle n’est pas la cause principale des destructions d’emploi, ni du chômage.
 
Les licenciements boursiers sont des exceptions. Aux Etats-Unis, plusieurs études portant sur la période 1970-1997 montrent qu’en moyenne, le cours de l’action baisse (faiblement) à la suite d’une annonce de réduction d’effectifs.
 
Les procédures de licenciements collectifs seraient l’expression de moins bonnes perspectives de profits. Des exemples isolés, minoritaires, ne peuvent être généralisés simplement pour en faire des « lois économiques », lesquelles doivent exprimer des tendances générales. Les licenciements économiques dans le cadre de plans sociaux ne concernent que 0,5 % des personnes qui quittent leur emploi même si on ne peut pas se désintéresser du sort des personnes qui subissent les plans sociaux.
 
La recherche d’emploi (le chômage) est un rouage indispensable du PDC, elle est nécessaire au bon fonctionnement de l’économie. On observe, au sein des pays industrialisés, une forte ressemblance en matière de créations/destructions d’emplois, mais de grandes différences des résultats au niveau du chômage. C’est la gestion différenciée de ce PDC qui explique les divergences en matière de chômage, en matière de réactivité du MT.
 
Démographie et chômage
 
Empiriquement, à long terme, l’immigration accroît l’emploi et la réduction de la population active (celle qui occupe ou qui cherche un emploi) réduit l’emploi. cela contredit l’idée selon laquelle l’économie d’un pays dispose d’un nombre fixe d’emplois (et d’heures de travail) et que ces emplois doivent être partagés ente ceux qui cherchent à travailler, afin de réduire le chômage.
 
Au contraire, c’est la hausse de la population en âge de travailler qui va provoquer la hausse de la population active et celle de l’emploi. L’emploi résulte d’une recomposition permanente et massive de l’appareil productif induite par le PDC. Croire qu’il suffirait de limiter l’immigration, de réduire la population active ou de partager le travail par les RTT, pour accroître l’emploi et réduire le chômage est une erreur. Les emplois sont fragiles dans la mesure ou ils s’inscrivent dans la dynamique d’un PDC. Ces mesures ne sont pas susceptibles d’améliorer l’efficacité de ce processus.
 
Salaire et chômage
 
La feuille de paie n'est pas toujours une ennemie pour l'emploi. Elle peut lui être favorable. Aujourd'hui, en France, les hausses du coût du travail au niveau du salaire minimum sont un frein à l'emploi des travailleurs les moins qualifiés. Les allégements de charges sociales permettent de maîtriser ces hausses tout en préservant le pouvoir d'achat du Smic. Mais ce n'est pas suffisant.
 
Il faut aussi créer les conditions pour que le travail salarié soit financièrement plus intéressant que l'inactivité. Des conditions qui ne sont pas toujours satisfaites. Il faut valoriser le travail grâce à des formes de crédit d’impôt (Prime pour l'emploi ou PPE) et favoriser l’embauche des plus éloignés du marché du travail en réduisant les charges sociales. Mais pour que le MT retrouve une pleine efficacité, il faut améliorer le processus d’appariement en réformant l’assurance chômage, la législation sur la protection de l’emploi (LPE) et les politiques de formation.
 
Utilité sociale du chômage et accompagnement
 
Afin de mettre en place un système adapté, on doit commencer par considérer le chômeur et la période de chômage autrement en admettant l’utilité sociale des mouvements de main d’œuvre et en répondant à une double exigence.
 
Primo, dans le cadre d’un système à indemnisation généreuse du chômage avec aide à la recherche d’emploi, on peut mettre en place un contrôle et des sanctions. En contrepartie, l’engagement du demandeur d’emploi permet d’améliorer la qualité de l’appariement, les parcours professionnels sont sécurisés, et il existe une plus grande cohérence entre les activités de recherche d’emploi, et les décisions de création et destruction d’emploi.
 
Secundo, on peut alors mettre en place une légalisation protectrice et une réglementation des licenciements adaptées. Notre LPE doit passer d’une culture du contrôle à une culture de l’incitation. Par l’introduction de systèmes de taxation et de bonus malus, on peut mieux protéger l’emploi présent et avenir. Les résistances aux assouplissements indispensables de la LPE reposent sur une connaissance erronée du fonctionnement dynamique du MT et du PDC.
 
L’assurance chômage et la protection de l’emploi sont nécessaires mais insuffisantes pour assurer un fonctionnement optimal du MT. Les politiques publiques de l’emploi doivent également avoir pour objectifs, la mise en place de systèmes d’éducation et de formation professionnelle adaptés aux changements permanents qui secouent le MT.
 
Les résultats des évaluations des politiques publiques d’éducation et de formation convergent. L’efficacité de ces politiques diminue avec le nombre de personnes concernées. Il convient de cibler les aides publiques, conséquentes, en direction des plus jeunes les plus défavorisés et d’impliquer les familles. Pour les adultes les plus défavorisés, et les plus âgés, les politiques de subvention à l’embauche grâce à l’abaissement des charges sociales se révèlent plus efficaces. Enfin l’évaluation des politiques publiques d’emploi est indispensable pour éviter de nombreux gaspillages de l’argent public.
 
 
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Tout savoir (ou presque) sur les politiques d'emploi en France
 
 

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