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David Mourey

  • : Démocratie Economie et Société
  • : David MOUREY Professeur d'Economie Auteurs de nombreux ouvrages d'économie chez De Boeck Fondateur des « Rencontres économiques » depuis 2005.« Rencontres économiques lycéennes » et « Rencontres économiques citoyennes »à Pontault-Combault depuis 2005 ! Fondateur des« Rencontres économiques » à Paris depuis 2008 !
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Texte Libre

 

2 avril 2007 1 02 /04 /avril /2007 19:32
Cyril Lemieux, sociologue à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, vient de publier (le 01 avril 2007) sur son blog un texte intitulé : « Qu’est-ce qui affaiblit l’Etat ? ».
 
A priori, je dirai que c’est l’affaiblissement de notre démocratie qui fragilise, qui affaiblit l’Etat. Si l’Etat ne dispose plus, aux yeux des citoyens, du monopole de la violence physique légitime, c’est que sa légitimité est érodée.
 
Or, dans une démocratie représentative, la légitimité de l’Etat repose d’abord sur la légitimité de ceux qui agissent au nom de l’Etat. Si ces derniers apparaissent de moins en moins légitimes aux yeux de personnes qui semblent de plus en plus nombreuses, il n’est peut être pas très étonnant que celles-ci manifestent leur hostilité avec une certaine violence à l’égard des forces de l’ordre, lesquelles sont supposées traduire le monopole de la violence physique légitime.
 
Cyril Lemieux écrit : « Après ce qui vient de se passer à la gare du Nord, certains candidats à la présidentielle réclament plus de répression: c’est qu’ils assimilent la vulnérabilité de l’Etat qui s’est révélée ici, à une faiblesse technique dans le maintien de l’ordre. Or, dans une perspective wébérienne, cette vulnérabilité est tout autant (et d’une certaine façon, elle est d’abord) imputable à un manque de légitimité aux yeux d’un certain nombre d’administrés. Dans cette optique, c’est une erreur des plus funestes que de confondre le rétablissement de la puissance publique avec l’intensification de ses techniques répressives. Non seulement la seconde ne suffit jamais à obtenir le premier mais encore, elle peut lui nuire… »
 
Je partage ce point de vue de l’auteur, mais je m’inscris davantage dans une perspective démocratique, dans la lignée d’Amartya SEN, que dans une perspective wéberienne.
 
La question posée est clairement la question démocratique.
 
L’Etat, en tant que garant de la sécurité intérieure, ne pourra retrouver toute sa légitimité tant que ceux qui nous représentent, et nous représenterons dans l’avenir, ne parviendrons pas à redonner du contenu, de la substance, à leur légitimité. Pour être légitime, dans une démocratie, il ne suffit pas d’être élu.
 
Encore faut-il être digne de cette légitimité.
 
Encore faut-il respecter durablement le contrat social « signé » avec tous les électeurs et avec tous les citoyens. Or, de ce point de vue, il me semble que nous sommes bien mal partis. Pourquoi ?
 
J’ai insisté dans le tout premier article de ce blog, « De l’importance du débat dans une démocratie moderne », sur le rôle central du débat dans une démocratie. La démocratie exige le débat, avais-je sous-titré l’article, en me fondant notamment sur les analyses d’Amartya SEN. Ce dernier, prix Nobel d’économie en 1998, dans un ouvrage intitulé « La démocratie des autres », explique que : 
 
« Dans une acception large, la démocratie ne se limite pas au processus électoral au suffrage universel. » « Les élections ne sont qu’un moyen de rendre les discussions publiques plus efficaces. »
 
Sur le second point, nous sommes vraiment très loin du compte. Et les responsables de cette situation sont les candidats à l’élection présidentielle.
 
« La force et la portée des élections dépendent de manière critique de la possibilité de l’existence d’un débat public ouvert. »
 
La possibilité d’un débat public ouvert existe, mais celui-ci n’a pas vraiment lieu. Certes, les candidats s’expriment ici, ou là, mais jamais ils ne débattent directement entre eux et devant les citoyens.
 
Pourquoi, cette crainte du débat démocratique quand on sollicite la démocratie pour atteindre la magistrature suprême ?
 
Je propose que soit inscrite dans la Constitution, l’obligation pour les candidats à l’élection présidentielle, de débattre directement entre eux et devant les citoyens.
 
Comment peut-on accepter et même concevoir que de tels débats ne puissent se produire ?
 
« La démocratie a une valeur instrumentale ou pratique importante, en amplifiant l'écoute accordée aux gens lorsqu'ils expriment et défendent leurs revendications à l'attention des politiques. »
 
 « Dans la perspective plus large du débat public, la démocratie doit accorder une place capitale à la garantie de la libre discussion, et à une interaction née de la délibération, à la fois dans la pensée et dans la pratique politiques, et cela, pas seulement grâce aux élections ou pour les élections. »
 
D’une part, l’écoute accordée aux gens reste limitée de manière générale, mais d’autre part, cette faible écoute n’intervient vraiment qu’en période électorale.
 
C’est un peu court pour combler le déficit démocratique que nous observons. Un déficit démocratique ne peut se traduire que par un manque de légitimité de l’Etat et, in fine, par une remise question profonde de ses institutions fondamentales.
 
C’est n’est certainement pas sur une telle base que nous pourrons construire un avenir qui ne s’inscrive pas dans le sillage de notre passé, celui de notre démocratie dévoyée.
 
A lire :
 
 
Cyril Lemieux : Qu’est-ce qui affaiblit l’Etat ?

commentaires

S
<br /> J'aime beaucoup la visoin de la démocratie de SEN.<br /> <br /> <br />
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