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David Mourey

  • : Démocratie Economie et Société
  • : David MOUREY Professeur d'Economie Auteurs de nombreux ouvrages d'économie chez De Boeck Fondateur des « Rencontres économiques » depuis 2005.« Rencontres économiques lycéennes » et « Rencontres économiques citoyennes »à Pontault-Combault depuis 2005 ! Fondateur des« Rencontres économiques » à Paris depuis 2008 !
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Le Livre de la Semaine

 

 

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11 octobre 2007 4 11 /10 /octobre /2007 20:58
 
Dans une note « Flash économie » publiée hier, Patrick ARTUS évoque un scénario noir pour l’avenir proche. Dans 4 ans, en 2011, le monde pourrait connaître une crise profonde de l’endettement. Ce scénario n’est pas très optimiste, c’est le moins que l’on puisse dire. Pour autant, attirer l’attention sur le fait que ce type de figure de l’avenir pourrait se réaliser, peut nous conduire à l’éviter. Ce n’est pas en fermant les yeux aux figures du possible, aussi pessimistes soient elles, qu’on peut choisir de construire une autre « histoire » de l’avenir. Patrick ARTUS ne nous invite pas à l’inaction, il semble plutôt combiner « le pessimisme de la raison et l’optimisme de la volonté ».
 
Les composantes de « La « catastrophe » de 2011 »
 
Pour l’auteur, en résumé, « La « catastrophe » de 2011 a les composantes suivantes :
- progressivement, dans quelques années, l’effet inflationniste qui vient de la hausse des prix des matières premières va l’emporter sur les autres effets désinflationnistes de la globalisation ;
- les banques centrales réagiront à ces pressions inflationnistes, à la différence de ce qui s’était passé dans les années 1970, et il y aura donc une hausse des taux d’intérêt réels (que n’anticipent pas encore les marchés) avec des politiques monétaires plus restrictives ;
- il y aura donc crise grave de l’endettement (la « catastrophe de 2011 »), puisque les taux d’endettement sont devenus très élevés dans la période où la globalisation était désinflationniste, et où les taux d’intérêt étaient bas, et seront incompatibles avec les taux d’intérêt réels qui apparaîtront dans le futur (admettons qu’il s’agit de 2011). »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
 
Autrement dit,  selon Patrick ARTUS, en 2011 ( ?), les menaces inflationnistes vont se manifester pleinement. En effet, au cours des années 1990, les taux d’endettement se sont nettement accrus, en raison de la faiblesse persistante des taux d’intérêt réels liée à un processus de ralentissement de l’inflation (désinflation) qui trouverait son origine dans le processus de globalisation.
 
En 2011, les facteurs inflationnistes de la globalisation (hausses des prix des matières premières liée à la croissance de la demande mondiale) vont dominer les facteurs désinflationnistes. Les banques centrales vont réagir à la nouvelle situation inflationniste en pilotant des politiques monétaires très restrictives qui consistent à augmenter fortement les taux d’intérêts nominaux, une hausse supérieure à celle de l’inflation. Les taux d’intérêt réels vont donc augmenter. Ipso facto, la croissance des réserves de change et des liquidités mondiales va ralentir, d’autant plus que la flexibilité croissante des taux de change de la Chine et des pays émergents  va accentuer ce mouvement. La forte hausse des taux d’intérêt réels permettra de contenir l’inflation. Donc, contrairement à ce qu’on avait pu observer au cours des années 1970, les taux d’intérêt réels négatifs dus à la hausse des prix de l’énergie avaient conduit à un désendettement, on assisterait cette fois à un alourdissement des taux d’endettement hérités de la période de taux d’intérêt réels faibles. Cette hausse durable des taux d’intérêts réels combinée à un alourdissement de la charge des intérêts de la dette et des taux d’endettement, pourrait se traduire par une crise économique réelle et financière sévère.
 
Comment expliquer ce scénario catastrophe ?
 
 
La globalisation, si elle fut d’abord désinflationniste, deviendrait de plus en plus inflationniste. En effet, dans les grands pays de l’OCDE comme les Etats-Unis, la zone euro et  le Japon, la globalisation influence l’inflation par plusieurs canaux.
 
Il y a d’abord « la compression des salaires, qui augmentent moins vite que la productivité  en raison des délocalisations, des pertes d’emplois industriels, de la nature des emplois crées (emplois peu protégés dans les services). »
Ainsi, « aux Etats-Unis, depuis 2006, les gains de productivité sont sous-estimés (de près de 1 point par an) par l’absence de mesure correcte des pertes d’emplois dans la construction. Ce premier effet est naturellement désinflationniste. »
 
De même, « la hausse des coûts salariaux unitaires et des prix dans les pays émergents, est naturellement inflationniste, mais est de faible ampleur, en raison du bas niveau de ces coûts, des migrations internes dans les pays émergents qui réduisent les hausses de salaires. »
 
Ensuite, on trouve, « la hausse de la part de marché des pays émergents dans le commerce mondial et dans la demande intérieure des grands pays de l’OCDE, qui est nettement désinflationniste avec le bas niveau des prix de ces produits. »
 
Il y a aussi, « la dépréciation des monnaies des grands pays de l’OCDE vis-à-vis des monnaies des émergents, qui est inflationniste. Ceci vaut pour le dollar et le yen, mais pas pour l’euro qui est stable vis-à-vis des monnaies des émergents. »
 
Enfin, « la hausse des prix des matières premières, qui est naturellement inflationniste, et est due à la rapidité de la croissance mondiale, en particulier dans les émergents. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
 
La globalisation a initialement été désinflationniste
et l’est encore aujourd’hui.
 
« L’effet initial essentiel de la globalisation est de faire apparaître un énorme choc favorable d’offre avec l’ouverture des échanges avec les pays émergents qui disposent d’une population en âge de travailler considérable et d’une épargne très élevée. S’il y a choc favorable d’offre, il y a désinflation. ». »
 
« Mais la globalisation a aussi fortement accru la demande pour les matières premières, comme le montre l’exemple de la Chine, d’où un accroissement de l’effet de rareté pour les matières premières, et une hausse de leurs prix. »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
 
Le choc de 2011
 
« Les calculs montrent que dans quelques années (nous suggérons la date de 2011 ?), les effets inflationnistes de la globalisation (hausse des coûts de production dans les pays émergents, appréciation des devises des économies émergentes, hausse de prix des matières premières) l’emporteront sur ses effets désinflationnistes (compression des salaires, hausse de la part de marché des produits des émergents). » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
Tensions inflationnistes, banques centrales
et hausse des taux d’intérêts réels.
 
La réaction des banques centrales à ses pressions inflationnistes pourrait se traduire par une hausse des taux d’intérêt réels
 
« Pressions inflationnistes venant de la globalisation ne veut pas dire inflation, si les banques centrales réagissent à ces pressions. Lors des chocs pétroliers des années 1970, les taux d’intérêt réels sont devenus négatifs de 1974 à 1977 aux Etats-Unis, en 1975-76 en Allemagne, de 1974 à 1980 en France et de 1973 à 1977 au Japon. »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
« Aujourd’hui, compte tenu de leur mandat, il est très probable que les banques centrales résisteraient à ces pressions inflationnistes venues surtout de la hausse des prix des matières premières. Ceci implique que la Réserve Fédérale, compte tenu de l’effet inflationniste durable des prix des matières premières, repasserait à un objectif d’inflation totale et non d’inflation sous-jacente. On a bien vu, aux Etats-Unis et dans la zone euro, les réactions fortes des taux directeurs des banques au risque inflationniste en 1999-2000 puis en 2005-2006. »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
Patrick ARTUS en déduit donc que « des poussées inflationnistes dues aux prix des matières premières (à partir de 2011 ?) conduiraient», non pas à une hausse de l’inflation, qui serait combattue, « mais à une hausse des taux d’intérêt réels (et nominaux, mais pas par la composante inflation). »
 
Les marchés n’anticipent pas cette situation inflationniste future
 
« Certes, les courbes d’inflation de point mort sont très plates, mais les courbes des taux d’intérêt nominaux sont aussi très plates (aux Etats-Unis et dans la zone euro, pas au Japon, ce qui est incompatible avec la réaction des banques centrales aux pressions inflationnistes décrites plus haut. On doit donc s’attendre, dans le futur, à une hausse durable (donc valable pour toutes les maturités de taux d’intérêt) des taux d’intérêt réels (ce que ne montrent pas encore aujourd’hui les taux d’intérêt réels à terme). »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
 
Une hausse (à partir de 2011 ?) qui va affecter
des agents économiques
ayant des taux d’endettement très élevés
 
 
La hausse des taux d’endettement pendant la période de taux d’intérêt réels bas.
 
« On a observé depuis le milieu des années 1990 une forte hausse du taux d’endettement du secteur privé (surtout les entreprises à la fin des années 1990, surtout les ménages dans les années 2000, aux Etats-Unis, dans la zone euro hors Allemagne. L’Allemagne et le Japon sont dans une situation particulière puisqu’il y a désendettement du secteur privé, en Allemagne après la réunification, au Japon après la crise patrimoniale du début des années 1990. On observe aussi une hausse du taux d’endettement public, au Japon, et, dans tous les pays, une hausse du taux d’endettement global. »
NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie, n°376 du 10 octobre 2007
 
 
On retrouve ici l’idée, défendue par Patrick ARTUS et présentée à plusieurs reprises sur ce blog, selon laquelle une politique monétaire excessivement et durablement accommodante a évidemment stimulé, par le bas niveau des taux d’intérêt réels qu’elle a permis, un endettement croissant des agents économiques. De surcroît, l’abondance de la liquidité mondiale, résultant essentiellement de l’accumulation de réserves de change par les économies émergentes et les pays exportateurs de matières premières a renforcé ce mouvement à la baisse des taux d’intérêts. Ce qui à terme est potentiellement inflationniste, puisqu’on se situe dans le cadre de l’hypothèse selon laquelle nous en sommes en situation d’excès de liquidité et non d’excès d’épargne. Dans le premier cas, une hausse des taux d’intérêts s’impose, alors que dans le second cas, c’et une baisse des taux d’intérêt qui doit être appliquée.
Donc, excès d’épargne ou excès de liquidité ? Politique monétaire restrictive ou politique monétaire expansionniste ?
 
La suite de l’histoire très bientôt….
 

A consulter :

 
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
 
 
 
 
Le débat en vidéo
 
 
 
Un article sur le site du quotidien Libération
 
 
 
Un autre article sur le site du quotidien Libération
 
 
1 octobre 2007 1 01 /10 /octobre /2007 20:45
 
Ce Soir ou Jamais
 France 3
 
L’émission du jeudi 27 septembre
 
Revue de presse économique :
Faillite de la France, Crise financière et décroissance…
 
 
Jean-Paul Fitoussi, économiste
Il est président de l’Office Français des Conjonctures Economiques qui est à la fois un centre universitaire de recherche et un institut de prévision et d’évaluation des politiques publiques. Il enseigne à l’IEP de Paris et parmi toutes les commissions où il siége, il est membre du conseil d’analyse économique auprès du Premier Ministre. « Dans la politique de l’impuissance » parue en 2005, il tente de réconcilier les dogmes du marché et de l’antilibéralisme.
 
Nicolas Baverez, essayiste
Essayiste, énarque et normalien, il est souvent présenté comme l’un des principaux représentants du déclinisme français qui dénonce une France en perte de vitesse, incapable de se soumettre aux réformes indispensables. Dans son dernier livre, « Agenda 2007, que faire ? » publié l’an dernier, il rappele que le temps n’est plus au constat car le déclin de la France est une réalité, désormais notre pays doit entrer de plein pied dans la modernité en appliquant une thérapie de choc sur le plan économique.
 
Jean Marie Harribey, économiste, co-président d’ATTAC France
Il enseigne l’économie et l’analyse des problèmes sociaux à l’Université de Bordeaux. Il a été élu, fin 2006, co-président d’ATTAC France et il est l’une des figure du courant de pensée économique anti-libérale. Il a dirigé la publication du Petit alter, dictionnaire altermondialiste en 2006.
 
Philippe Ries, essayiste
Il est journaliste à L’Agence France Presse où il a fait une bonne partie de sa carrière. Il a été plusieurs années en poste en Asie, en particulier à Hong-Kong où il a vécu la rétrocession à la Chine. IL est le co-auteur en 2006 avec Philippe Jaffré, ancien président d’Elf décédé récemment, de « Le jour où la France a fait faillite », un essai fiction qui imagine que notre pays se réveille un jour interdit bancaire en 2012…
 
Catherine Lubochinsky, économiste
Membre du cercle des économistes, elle enseigne à l’Université Paris II-Panthéon-Assas. Elle était consultante au Service des Études et des Marchés et de la Stabilité Financière à la Banque de France. Elle a publié dans diverses revues économiques plusieurs travaux concernant la volatilité des marchés financiers.
 
Vous pouvez voir l’émission ici :
 
 
24 septembre 2007 1 24 /09 /septembre /2007 20:28
 
L’impératif de la compréhension
 
La compréhension des mécanismes de transmission des effets des crises financières à l’économie réelle est un enjeu de l’analyse économique, mais c’est aussi un enjeu pour nous tous (entreprise, ménages, travailleurs salariés ou indépendants) qui sommes au cœur d’un « grand jeu de domino », lequel pourrait in fine nous faire chuter lourdement.
 
Comprendre pour apprendre à … ne pas recommencer
 
Essayer de comprendre est un premier pas essentiel, une nécessité qui pourrait nous permettre d’éviter le pire dans un avenir proche mais également, nous en avons déjà parlé, de ne pas retomber dans les mêmes travers qui seraient étroitement liés, essentiellement, à la combinaison d’un politique monétaire excessivement et durablement expansionniste et aux conséquences inévitables de la « Finance de Ponzi ».
 
L’hypothèse de l’excès de liquidité, et de ses causes éventuelles, sera bientôt mise en discussion sur ce blog. A suivre…
 
Dans une note récente - NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007 -, Patrick ARTUS tente de présenter les mécanismes par lesquels a crise des crédits « subprime » pourrait provoquer une récession mondiale.
 
Le scénario du pire doit être analyse ex ante
 
« Le scénario le plus raisonnable est celui où la crise immobilière aux États-Unis ralentit l’économie mondiale mais est loin de la plonger dans une récession. Notre scénario central n’est donc absolument pas celui d’une récession en 2008, mais nous nous intéressons cependant aux canaux par lesquels, dans le pire des cas, cette récession pourrait survenir (…). A nouveau, il ne s’agit pas du tout du scénario que nous privilégions, mais ces canaux de transmission négatifs de la crise sont importants à analyser. De plus, nous ne nous intéressons ici à aucune cause possible non liée à la crise du subprime d’un freinage de l’économie mondiale : protectionnisme, crise géopolitique. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
La combinaison de ces mécanismes qui pourraient, contrairement aux attentes, déclencher une nouvelle récession mondiale sont : une situation de « credit crunch » généralisé, la chute du commerce mondial et les difficultés induites pour les pays dépendant des exportations, le recul des prix des matières premières et de la croissance des pays producteurs, l’extension du « flight to quality » aux émergents, la fin des effets de richesse liés aux prix des actifs, la chute du dollar, l’ arrêt du « carry-trade » et la déflation au Japon.
 
Normalement, la crise immobilière ralentit modérément
la croissance mondiale…
 
« La crise immobilière aux Etats-Unis est grave avec l’énorme stock de maisons invendues, chute de l’activité de construction, chute des prix des modérément la maisons entraînant un freinage du crédit aux ménages et les défauts des emprunteurs en subprime qui ne bénéficient plus de plus values immobilières. En raison des ventes de certains fonds, de la hausse de l’aversion pour le risque, de la défiance des investisseurs et des banques, la crise s’est étendue à d’autres marchés : interbancaire, produits structurés et titrisés, actions, dérivés de crédit. Le freinage de la demande aux États-Unis, amplifié dans le futur par le durcissement des conditions de crédit aux ménages des banques se transmet aux autres pays par le commerce extérieur. Déjà, les exportations du Japon, du Canada et des émergents d’Asie autres que la Chine, de l’Amérique Latine vers les États-Unis ne progressent plus ou reculent. Cependant, malgré l’extension de cette crise, le jugement le plus raisonnable aujourd’hui reste qu’elle va provoquer un ralentissement de l’économie mondiale. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
 
… pour une série de raisons connues
 
« -la liquidité mondiale reste très abondante, avec l’accumulation de réserves de change dans les pays émergents et exportateurs de matières premières ;
 -la profitabilité est élevée dans les grands pays de l’OCDE, et la situation financière des entreprises très bonne, leur taux de défaut extrêmement faible ;
-la croissance des émergents est forte, et de plus en plus alimentée par leur demande intérieure, par le niveau élevé des prix des matières premières ;
-les banques centrales des grands pays de l’OCDE ont réagi très rapidement pour éviter une crise bancaire, et passent maintenant à une politique monétaire plus expansionniste, ou renoncent à une politique plus restrictive ;
-même dans les pays où l’industrie se contracte et qui sont affectés par la crise de la construction, les emplois de service progressent rapidement ;
- les politiques budgétaires pourront jouer un rôle contra cyclique aux Etat-Unis, dans la zone euro (sauf en France). » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
Des mécanismes puissants doivent permettre d’éviter une récession et le scénario privilégié est bien celui d’un ralentissement modéré de l’économie mondiale comme on peut l’observer dans le tableau suivant.
 
De la figure du probable, ...  à la figure du possible
 
En situation d’incertitude, la sagesse conduit à la prudence. Or, l’éventualité d’une récession mondiale ne pouvant être écartée avec certitude, il convient d’en mettre en lumière la combinaison des mécanismes qui pourraient nous y conduire.
 
Patrick ARTUS nous propose donc de distinguer 7 mécanismes pouvant conduire l’économie mondiale sur le chemin de la récession.
 
 
Le mécanisme n° 1 est celui de l’extension du « credit crunch »
 
Le « credit crunch » va-t-il s’étendre aux ménages européens ou aux entreprises ?
 
« On voit pour l’instant les banques durcir les conditions des crédits vis-à-vis des fonds, vis-à-vis des ménages aux États-Unis mais pas vis-à-vis des ménages européens ou des entreprises. Et, même aux États-Unis, la hausse des taux d’intérêt sur les crédits hypothécaires reste assez faible. On pourrait cependant craindre que, puisque les pertes réalisées sur le subprime vont augmenter en raison du profil des « reset » (fin de la période de deux ans à taux d’intérêt faible dans les crédits subprime, tableau), les banques deviennent plus restrictives sur les ménages, y compris en Europe, deviennent restrictives sur les entreprises qui sont déjà touchées par la hausse des spreads de crédit. Ceci accélérerait le freinage du crédit aux ménages (aux États-Unis, dans la zone euro), pourrait le déclencher au Royaume-Uni ; retournerait à la baisse le crédit aux entreprises, qui freine déjà au Royaume-Uni. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
 
Selon le mécanisme n° 2, la chute du commerce mondial causerait de grandes difficultés aux  pays qui dépendent des exportations
 
Les pays très ouverts ou échanges internationaux, donc fortement dépendants des exportations pour leur croissance, pourraient souffrir.
 
« Le recul de la croissance aux États-Unis a déjà généré un freinage visible des importations des États-Unis et des exportations vers les États-Unis, sauf pour l’instant en ce qui concerne la Chine. Or, un certain nombre de pays dépendent beaucoup des exportations pour assurer leur croissance, parce que la taille des exportations est grande et/ou parce que la demande intérieure augmente peu. Deux exemples caractéristiques sont l’Allemagne et le Japon. Les pays émergents d’Asie ont une part des exportations dans le PIB élevée mais ont aussi une demande intérieure en croissance forte. D’autres pays, enfin, dépendent très fortement de la conjoncture américaine, Mexique ou Canada par exemple. Le risque est donc un enchaînement dépressif se transmettant à partir des pays où les exportations ou la croissance des États-Unis sont le moteur de la croissance domestique. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
 
Le mécanisme n° 3 se traduit par un recul des prix des matières premières pourrait provoquer un ralentissement de  la croissance des pays producteurs.
 
Un ralentissement de la demande mondiale induirait un repli des prix des matières premières entraînant, à son tour, des exportations de ces pays producteurs provoquerait inévitablement un ralentissement de la croissance du PIB de ces pays.
 
« La croissance des pays exportateurs de matières premières a été depuis 2002 tirée par la hausse du prix relatif des matières premières. Mais le freinage de la croissance mondiale a normalement comme effet de faire baisser les prix des matières premières, d’où une moindre croissance de ces pays. Aujourd’hui, les prix du pétrole et des métaux non précieux sont stabilisés, ceux des autres matières premières continuent à progresser. De plus, si les prix des matières premières baissent, les excédents commerciaux des pays exportateurs reculent (ce qui se voit déjà), ainsi alors que leur accumulation de réserves de change (ce qui se voit moins), ce qui conduit à un freinage de la liquidité mondiale, ce qui va aussi dans le sens d’une contraction de l’activité. »
 
Selon le mécanisme n° 4, l’extension du « flight to quality »
attendrait les pays émergents
 
Si désormais, les phénomènes de fuite des capitaux vers la qualité,vers des économies ou les placements sont moins emprunts d’incertitude et donc moins risqués, le « flight to quality »,  atteignent les économies émergentes, cela pourrait provoquer une crise de change pour les monnaies locales et de facto un ralentissement, voire une baisse de l’activité économique.
 
« La crise de l’été 2007 ne s’est pas (au-delà de très courtes périodes de temps) étendue aux émergents dont la situation macroéconomique est solide : si les spreads obligataires se sont ouverts avec tous les autres spreads, les taux de change ont très peu bougé et les bourses ont continué à monter en dehors d‘une période très courte. Il n’y a pas eu de retrait des capitaux des investisseurs malgré la hausse de leur aversion pour le risque. Un retrait des capitaux depuis les pays émergents provoquerait une forte dépréciation du change de ces pays, une dégradation des termes de l’échange et un recul de la demande intérieure et de l’activité comme en 1997-2000. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
  
Le mécanisme n° 5 concerne la fin des effets de richesse
 
L’effet de richesse était entretenu par la hausse des cours des actifs et se traduisait par de fortes plus-values. La disparition des plus-values en capital fondée sur les prix croisant pour les actifs provoquerait une réduction de la demande des ménages et des entreprises.
 
« La crise du subprime a été déclenchée par le recul des prix de l’immobilier résidentiel aux États-Unis ; dans les autres régions, ces prix sont stabilisés, tandis que, en dehors des émergents, les cours boursiers ont reculé. L’expérience du passé montre que la disparition des plus-values immobilières a surtout comme effet de ralentir le crédit aux ménages, donc la demande des ménages comme on l’a vu plus haut dans la crise du subprime, tandis que la disparition des plus-values sur actions a surtout comme effet de freiner l’investissement des entreprises, comme pendant la crise de la IT (nouvelles technologies). » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
Avec le mécanisme n° 6, c’est la chute du dollar qui poserait problème
 
Un recul important du dollar ayant pour corollaire une appréciation de l’euro et du Yen, entraînerait une perte de compétitivité de l’Europe et du Japon, zone dont la croissance n’est pas suffisamment soutenue et durable au point de la avoir mener prés de leur potentiel productif et donc du plein emploi des facteurs de production.
 
« Le ralentissement de l’activité aux États-Unis sera plus important que dans le Reste du Monde, puisque c’est aux États-Unis que la crise de la construction conduit à une chute de l’activité de construction. Il est donc normal d’attendre, comme les marchés financiers une baisse des taux d’intérêt à court terme des États-Unis relativement à ceux des autres régions, d’où une dépréciation supplémentaire du dollar (par rapport à l’euro et au yen) et une détérioration de la compétitivité des autres régions, ce qui est déjà le cas pour l’Europe mais pas pour le Japon. On a vu cependant depuis 2 mois la remontée nette du yen par rapport aux autres devises. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
Enfin, le mécanisme n° 7 se traduit par l’arrêt du « carry-trade »
et la récession au Japon
 
Un des jeux à la mode chez les spéculateurs sur les marchés de change consiste à jouer, à parier, sur les différentiels de taux d'intérêt. C'est ce type de jeu qui permet d’expliquer pourquoi le taux de change du yen a chuté par rapport aux autres monnaies. Mais, comme tout jeu, sur les marchés financiers, il est très risqué et il porte en lui les germes de sa propre destruction à long terme, si un seuil fatidique est dépassé.
 
Le « carry trade », comme tout jeu risqué, peut par nature apporter gros ou nous faire glisser sur une peau de banane. On ne peut pas avoir le beurre, l’argent du beurre et la crémière avec. Les règles du jeu sont très simples. En effet, il suffit de jouer sur les différentiels de taux d'intérêt.Un investisseur va emprunter dans une monnaie dont les taux d'intérêt sont bas afin de placer cette somme en achetant des actifs, libellés dans une autre monnaie, dont les rendements et les plus values potentielles sont élevés.
 
La monnaie du Japon, le yen est l’un des supports privilégiés pour ce type de loterie. En effet, en vertu de politiques monétaires moins expansionnistes en Europe et aux Etats-Unis, les taux d'intérêt de la Banque du Japon sont de venues nettement plus bas que ceux de la BCE et de la FED notamment. Cet écart des taux d’intérêt à court terme a pu atteindre 4,5 %. Logiquement, l’intérêt des investisseurs était d’emprunter en yens puis de convertir ces yens en dollars, en euros ou en livre sterling pour ensuite les investir sur les marchés occidentaux porteurs. La forte vente de yen, au moment de la conversion, se traduit ipso facto par la chute du cours du yen par rapport à la plupart des devises occidentales. Cela facilite certes les exportations japonaises, mais cela renchérit les importations est peut être source d’inflation. On en déduit aisément les conséquences d’un enchaînement contraire.
 
« La faiblesse des revenus des ménages japonais explique la faiblesse de la demande des ménages au Japon. La croissance du Japon dépend des exportations et des investissements liés et est menacée directement par le ralentissement américain ; par la poursuite de l’arrêt du carry-trade sur le yen et par l’appréciation induite du yen. Le retour à un yen fort aurait deux types d’effets négatifs : direct sur la compétitivité ; par l’intermédiaire du retour à une inflation négative donc à un risque de déflation, l’inflation nulle n’étant obtenue que grâce à la hausse des prix des importations avec le yen faible. » NATIXIS, Patrick ARTUS, Flash Economie N° 334, le 17 septembre 2007
 
Synthèse
 
« Pour toutes les raisons évoquées plus haut (profitabilité élevée, liquidité abondante, soutien des banques centrales, croissance forte des émergents, possibilité d’utiliser les politiques budgétaires), l’effet normal de la crise immobilière aux États-Unis est un ralentissement de l’économie mondiale, pas du tout une récession. Ce qui précède constitue donc plutôt une liste de mécanismes à surveiller pour savoir si, de manière improbable, une récession n’est pas cependant en train d’apparaître. Si plusieurs de ces mécanismes apparaissaient, alors il faudrait devenir inquiet au sujet de la croissance mondiale en 2008. »
 
Informations de ce lundi 24 septembre 2007
 
Appréciation de l’euro par rapport au dollar
 
Selon des informations de ce jour, lundi 24 septembre 2007, la chute du dollar et la flambée de l'euro ont toutes les chances de se poursuivre cette semaine. L'euro a terminé la semaine en franchissant un nouveau record à la hausse, s'échangeant à 1,4120 dollar vendredi sur le marché des changes de Londres, aux alentours de 7 h 30 (8 h 30 à Paris). La Réserve fédérale américaine ayant clairement indiqué qu'elle réduirait encore ses taux directeurs s'il y avait le moindre risque que la crise financière liée aux crédits immobiliers s'étende à l'économie réelle, le dollar pourrait s'affaiblir encore.
 
Le prix du pétrole remonte
 
Le baril de pétrole atteint un nouveau sommet historique à Londres à 79,94 dollars par baril. Le brent de la mer du Nord a touché vendredi soir un nouveau plus-haut sur le marché londonien, avant de terminer à 79,30dollars. En repli après 7 séances de hausse consécutives, le brut américain continue quant à lui de flirter avec les records, à plus de 81dollars par baril. ...
 
Ces premiers signes sont-ils de mauvais augure et permettent-ils d’envisager le scénario « noir » analysé par Patrick ARTUS ? Il est bien trop tôt pour tirer de telles conclusions. Mais si le pire n’est jamais sûr, ce qui est certain, en revanche, c’est qu’en période d’incertitude, le manque de confiance ne permet pas d’envisager l’avenir avec optimisme. Pour autant, l’enchaînement des mécanismes pervers précédents n’est pas inscrit dans le marbre d’un avenir joué d’avance. L’avenir étant devant nous, en prenant conscience des risques systémiques qui nous menacent, les autorités politiques, monétaires,… peuvent nous permettre d’écrire un autre futur.
 
 
A consulter:
 
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
 
 
 
 
Le débat en vidéo
 
 
 
Un article sur le site du quotidien Libération
 
 
 
Un autre article sur le site du quotidien Libération
 
 
 
19 septembre 2007 3 19 /09 /septembre /2007 20:29
 
Etats-Unis : des Fed funds à 4,00% en 2008
 
 La baisse des taux ne fait que commencer (?)
 
« La Fed a finalement décidé d’abaisser l’objectif des Fed funds de 50pb à 4,75% lors de son FOMC du 18 septembre. Cette baisse agressive des taux reflète selon nous une forte inquiétude sur la croissance mais vise également à remédier à la crise de confiance sur les marchés. Même si la Fed ne donne pas d’informations sur ses futurs mouvements de politique monétaire, nous pensons qu’elle optera pour un assouplissement monétaire plus marqué. En effet, (…) , les risques se sont cependant intensifiés ces dernières semaines (persistance de la crise de liquidité, faiblesse de l’emploi,…). En conséquence, nous anticipons désormais un ajustement monétaire supplémentaire de 75 pb qui ramènerait les Fed funds à 4,00 % à la fin du premier trimestre 2008. » Natixis Special Report 19 septembre 2007
 
 
« Le Board des Gouverneurs (de la Fed) a également diminué le taux d’escompte (taux auquel les banques peuvent se refinancer auprès de la banque centrale lorsque la liquidité interbancaire s’assèche) de 50 pb, le ramenant à 5,25%. Ce dernier est ainsi passé de 6,25% à 5,25% depuis le début de la crise (le 17 août dernier, la Fed avait déjà annoncé une baisse de 50pb du taux d’escompte). (..) » Natixis Special Report 19 septembre 2007
 
Incertitude, risque « credit crunch »et besoin de confiance
 
« Cet assouplissement monétaire, plus agressif qu’attendu suggère que la Fed est très inquiète sur les conséquences potentielles de la crise financière sur l’économie américaine. En particulier, le resserrement des conditions de crédit avec le risque de « credit crunch » est la principale source de préoccupation. L’ampleur du mouvement a été justifiée par le souci d’éviter les effets négatifs de la crise financière sur la croissance. De notre point de vue, cette baisse plus agressive reflète d’une part une réelle inquiétude de la Fed sur le risque de récession mais aussi la volonté de redonner confiance aux marchés après une période très perturbée. » Natixis Special Report 19 septembre 2007
 
La croissance avant l’inflation
 
Le risque inflationniste passe de facto au second plan, mais la Fed souligne que « le Comité continuera d’appréhender les effets de la crise financière et agira si nécessaire pour promouvoir la stabilité des prix et une croissance soutenable ».
 
Un assouplissement monétaire aux effets positifs….
 
Selon le scénario de Natixis, « les risques se sont intensifiés avec la détérioration des conditions de crédit. En conséquence, il devient plus probable que la Fed ramène la politique monétaire vers la neutralité ce qui suppose un taux des Fed funds proche de 4%. En effet, le scénario repose sur une croissance américaine durablement faible (proche de 2% en 2008) et une décélération de l’inflation (2,2% en 2008). Au total, la croissance nominale sera donc légèrement supérieure à 4%, ce qui laisse encore à la Fed des marges de manœuvre pour baisser les taux. (…) L’assouplissement monétaire aura un effet positif sur la croissance permettant de limiter le credit crunch mais également les défauts des emprunteurs… ». Natixis Special Report 19 septembre 2007
 
…mais attention aux effets différés à long terme
 
En cas de politique monétaire excessivement et durablement expansionniste, les mécanismes de la « Finance de Ponzi » peuvent resurgir là ou on de les attend pas.
 
A consulter:
 
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
 
 
 
 
19 septembre 2007 3 19 /09 /septembre /2007 19:51
 
La FED baisse le taux d’intérêt
et
la Banque d'Angleterre maintien le statu quo
 
J’ai insisté, dans plusieurs billets précédents sur l’inéluctabilité et l’inséparabilité, des effets de la crise financière sur l’économie réelle. Les banques centrales en ont eu conscience dés les premiers symptômes de la crise du Subpime car elles sont intervenues dés le moi d’août. Le potentiel de défaut avenir sur le marché du prêt hypothécaire aux Etats-Unis et les conséquences réelles probables créent une situation d’incertitude telle que les banques centrales, et même la banque centrale européenne, n’hésitent plus à se montrer très prudentes. En alimentant les marchés en liquidité, elles espèrent non seulement contenir les effets négatifs présents mais également juguler les impacts pervers des mois prochains. Pour autant, comme le dit Patrick ARTUS, il faudra prendre garde à ne pas créer les conditions d’occurrence de la prochaine crise financière en luttant contre la crise présente.
 
Quand le présent permet de préparer l’avenir
à l’aune des enseignements du passé.
 
En d’autres termes, les banques centrales ne doivent pas jouer au jeu du pompier pyromane. Paradoxalement, à force de venir trop facilement au secours de ceux qui ont allumé un feu, on jour le rôle d'assistant à l'allumage du prochain incendie. C'est la situation d'aléa moral bien connue des économistes. Celui qui est certain d'être secouru en cas de trop grande prise de risque non rentable, in fine, va être incité à prendre toujours davantage de risques. Tant qu'il ne paie pas l'addition tout en encaissant les recettes, il peut continuer son jeu de funambule.
 
Il ne faut pas oublier que ce sont les choix effectués dans le présent, afin de gérer les conditions présentes, qui installent progressivement les conditions de l’avenir dans le cadre desquelles, les mêmes causes produisant les mêmes effets, se mettront inévitablement en scène les mêmes jeux dangereux de dominos.
 
L’incertitude demeure
 
Les effets de la crise financière se diffusent par contagion et le « plus dur » de la  crise étant probablement devant nous, comme le dit notamment Patrick Artus, directeur de la recherche économique chez Natixis., les banques centrales agissent. Après la BCE qui a maintenu préventivement et avec précaution ses taux, c’est la réserve fédérale américaine qui a un peu surpris son monde.
 
Dans un document publié ce jour par la direction des études économique de BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 362 18 septembre 2007, aux Etats-Unis, la cible des Fed funds a été abaissée de 50 points de base, à 4,75 %.
 
« A l’occasion de la réunion qui s’est tenue le 18 septembre, le FOMC a décidé de baisser l’objectif des Fed funds de 50 points de base (pb), à 4,75%. Il s’agit du premier mouvement depuis juin 2006. Cette décision confirme le changement de priorité de la politique monétaire en août et septembre, suite à la crise traversée par les marchés financiers et à la détérioration accélérée des conditions sur le marché du travail. » BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 362 18 septembre 2007
 
Les risques sur l’économie réelle dominent désormais les risques d’inflation
 
« Les préoccupations au sujet de la croissance et de l’emploi dominent désormais clairement les craintes au sujet de l’inflation. Ce changement de priorités avait déjà transparu à travers les interventions de la Fed en août (injections de liquidités, baisse du taux d’escompte le 17 août, nouveau communiqué du FOMC). (…) Finalement, le FOMC a choisi de baisser son objectif de taux de 50pb. Ce choix peut notamment s’expliquer par :
 
(i) la détérioration des conditions sur le marché du travail, en plus de la crise traversée par les marchés financiers ;
(ii) le risque qu’une baisse de moindre ampleur soit jugée insuffisante et n’ait donc pas d’impact favorable sur les marchés – en d’autres termes, le souhait de ne pas être en retard sur les anticipations de marché. » BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 362 18 septembre 2007
 
Incertitude, perte de confiance et baisse des taux
 
« En vertu de « l’incertitude des perspectives,  la Fed est prête à agir en tant que de besoin » (…). « Ne prévoyant pas de redressement de l’activité ou du marché du travail dans le futur proche, nous attendons en conséquence d’autres baisses de l’objectif des Fed funds au cours des prochains mois. » BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 362 18 septembre 2007
 
Royaume-Uni
 
 
 
«  Aujourd'hui le Comité de Politique Monétaire de la Banque d'Angleterre a publié les Minutes de sa réunion des 5 et 6 septembre. A cette occasion, le Comité a voté unanimement en faveur du maintien du taux directeur à 5,75 %. »
 
L’économie réelle menacée
 
« Les développements sur les marchés financiers pourraient affecter l'économie réelle par des canaux différents, comme la hausse des taux d'intérêt sur le marché, la limitation de l’accès au crédit, l'activité réduite dans le secteur financier et l'ajournement de décisions d'investissement. » BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 363 19 septembre 2007
 
La Banque d’Angleterre accepte de jouer son rôle de
prêteur en dernier ressort
en fournissant des liquidités
 
« Bien que la Banque d’Angleterre ait initialement rejeté l'idée de prendre des créances titrisées ou « asset-backed securities » comme nantissement, elle les a acceptées dans son sauvetage de Northern Rock. Pour empêcher une répétition de ces événements, les régulateurs des marchés financiers pourraient devenir plus attentifs au risque de liquidité. » BNP-Paribas, Eco Flash 07 - 363 19 septembre 2007
 
A consulter:
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
 
 
 
 
15 septembre 2007 6 15 /09 /septembre /2007 14:58
 
Un débat intitulé « La politique est-elle esclave de la finance? », a été organisé en cette fin de semaine entre madame la Ministre de l‘économie et des finances Christine Lagarde et Jean-Paul Fitoussi, le président de l’OFCE (Président de l’Observatoire français des conjonctures économiques.
 
Ce débat a été animé par Grégoire Biseau, rédacteur en chef adjoint du service Ecoterre. Vous trouverez ci-dessous les liens pour aller écouter ce débat enregistré sous forme vidéo.
 
Selon Jean Paul Fitoussi, « La fonction supposée des marchés est de coordonner les plans futurs des agents économiques. Parce que l’on imagine que cette mission est aisément accomplie, la rhétorique prend le pas sur la réalité : les marchés financiers seraient capables d’évaluer les conséquences futures des décisions présentes, et donc de sanctionner les agents, y compris publics, dont les politiques seraient mauvaises. Leur magistère rendrait ainsi seconde la souveraineté des Etats. Les crises financières récurrentes montrent à quel point, au contraire, ils peuvent se tromper systématiquement, à quel point leur connaissance du présent et, a fortiori, du futur est lacunaire. Ils ont dès lors besoin de repères, que seul l’Etat peut donner : ce sont la valorisation des actifs sans risques (la dette publique) et le taux d’intérêt à court terme qui, de concert avec les interventions des banques centrales, définissent la liquidité du marché. On pourrait donc penser à une dialectique maître-serviteur entre la finance et la politique, s’il n’existait un maître en dernier ressort, qui est la Banque centrale. »
 
Encore une fois, Jean-Paul Fitoussi explique fort bien et très simplement qu’il ne faut pas inverser les priorités. Le politique, émanation de la démocratie, doit rester prioritaire par rapport à l’économie. C’est la démocratie qui doit permettre, in fine, de réguler les marchés, autrement dit l’économie de marché en général.
 
Le long terme de la démocratie doit permettre de compenser les excès du "court termisme" des marchés financiers….
 
Si la politique devenait l’esclave de la finance, cela signifierait la fin du politique et donc la fin de la démocratie. Ce serait également déclarer et accepter l’impuissance du politique en matière de régulation de l’économie de marché.
 
L’impuissance du politique n’étant que le reflet de l’impuissance de la démocratie, elle manifesterait la fin des choix collectifs assis sur les choix des individus qui composent cette société, selon les mécanismes de la démocratie politique.
 
Pour autant, il ne faudrait pas en déduire, abusivement, que les marchés financiers imparfaits du point de vue informationnel, ne permettent pas une allocation plus efficace de l’épargne et que de manière générale, il faudrait réduire le degré de liberté des agents économique sur les marchés financiers, en particuliers, sur tous les marchés de manière générale.
 
Ou en serait-on, du point de vue du développement, sans économie de marché, sans entreprises capitalistes pour entretenir le processus d’innovation, … ?
 
L’économie de marché, les marchés financiers peuvent être défaillants de manière récurrente, mais que serait notre niveau de développement en dehors de ce système : l’économie capitaliste de marché ? 
 
Il n’est jamais dit que par promotion de la démocratie, l’Etat doive réduire à la portion congrue le libéralisme économique porté par l’économie de marché.
 
Pour Jean Paul Fitoussi, nous vivons dans des "démocraties de marché" et bien loin d’être substituables, les mécanismes respectifs de l’économie de marché et de la démocratie sont complémentaires. Il suffit de comprendre qu’il ne faut pas inverser l’ordre des priorités. C’est la démocratie qui doit guider et contrôler l’avenir des économies de marché et non l’inverse L’économie de marché n’en sera que plus efficace.
 
A consulter :
 
 
 
 
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00
 
« Donc crise financière et crise réelle sont étroitement interdépendantes. Nous ne vivons pas dans un monde où il y aurait une dichotomie entre sphère financière et sphère réelle. » Jean Paul Fitoussi
 
Le débat en vidéo
 
 
 
Un article sur le site du quotidien Libération
 
 
 
Un autre article sur le site du quotidien Libération
 
 
11 septembre 2007 2 11 /09 /septembre /2007 21:02
 
Aujourd’hui, mardi 11 septembre 2007, dans un Chat accordé au Journal Le Monde, Jean Paul FITOUSSI, l’éminent Président de l’OFCE, livre ses premières impressions sur la crise financière et sur ses probables impacts sur l’économie réelle en Europe nottament.
 
« La crise financière aura-t-elle des conséquences sur l'économie réelle ?»
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
J’attendais les premiers commentaires des économistes de l’OFCE sur cette crise. Voici quelques courts extraits de ce qu’a raconté Jean Paul FITOUSSI. En attendant la suite, dans le cadre d’une lettre de l’OFCE ou d’un article dans une prochaine Revue de l’OFCE.
 
Voici quelques extraits des réponses apportées par le président de l’OFCE. Réponses qu’il peut être utile de mettre en regard avec tous les arguments présentés dans différents billets sur ce blog et avec les arguments développés ailleurs (sur d’autres blogs) dont les liens se trouvent en bas de page des différents billets.
 
EXTRAITS
 
Crise financière et crise de confiance
 
« Il faut comprendre que ce qu'on appelle crise financière est la conséquence d'une rupture de confiance sur les marchés financiers. (…) La crise de confiance vient de ce que les opérateurs sur les marchés financiers avaient acheté des titres qu'ils pensaient non risqués, alors qu'ils l'étaient considérablement. »
 
De l’opacité à la transparence de l’information
 
« Un des problèmes que pose cette crise est l'opacité qu'elle révèle. Et cette opacité s'étend aux banques. Dans quelle mesure les banques sont-elles contaminées par la détention d'actifs de mauvaise qualité ? (…) Sur ce point règne la plus grande opacité.  On ne sait pas. »
 
« On peut aussi comprendre qu'une transparence absolue en période de perte de confiance peut s'avérer être un remède pire que le mal. Comme la transparence ne suffit pas, parce qu'il faut encore l'interprétation que l'on fait du risque supporté par chaque entité financière, il se peut que la transparence conduise à des mouvements de panique. » 
 
Excès ou insuffisance de liquidités ?
 
« Je crois que ce qu'une crise de crédit révèle, c'est une insuffisance de liquidités. Il y a crise de crédit parce que les gens refusent de se prêter les uns aux autres, et que donc le marché est asséché en liquidités. Dans ce cas-là, le grand risque, c'est que les taux d'intérêt bondissent. (…). Donc, (…), les banques centrales interviennent très justement comme prêteurs en dernier ressort, pour éviter une envolée des taux d'intérêt qui serait préjudiciable à tout le monde. »
 
Des politiques monétaires trop laxistes ces dernières années ?
 
« C'est ce que l'on dit. On dit que le marché était trop liquide. Mais on voit bien qu'on est confronté à un paradoxe : si le marché était trop liquide, connaîtrait-il des crises de liquidité ? D'un autre côté, ce que l'on souligne par ce terme "excès de liquidité", c'était que les taux d'intérêt étant tellement bas, le crédit était très facile. »
 
Excès de liquidité ou excès d'épargne
 
« Le diagnostic qui me semble le plus probable, c'est que nous vivons dans un monde où il y a un excès d'épargne, parce qu'il existe de telles inégalités que les catégories les plus aisées ne peuvent qu'épargner davantage,… » (...) « Si la distinction entre excès de liquidité et excès d'épargne est utile, c'est que, (…) un excès de liquidité contient une menace inflationniste, alors qu'un excès d'épargne contient une menace déflationniste. Un excès de liquidité doit être combattu par une augmentation du taux d'intérêt, alors qu'un excès d'épargne doit être combattu par une baisse du taux d'intérêt,… »
 
De la crise financière à la crise réelle
 
« Une crise financière est nécessairement une crise réelle si elle n'est pas combattue. Elle est le symptôme d'une crise réelle à venir. Ce qu'on appelle crise financière, c'est une baisse de la valeur des actifs détenus par les agents économiques : baisse des Bourses, baisse de la valeur des obligations, donc en fait une baisse du patrimoine des ménages. Et comment peut-on imaginer qu'une baisse de la richesse des ménages n'ait pas d'effet sur l'économie réelle ?»
 
Le cas européen
 
« Je ne crois pas que l'Europe soit touchée en tant que telle. J'ai dit (…) que l'Europe était marginalement touchée du fait des opérations financières réalisées par les banques européennes aux Etats-Unis… »
 
« Il n'y a pas de raison que la crise ait un impact sur le consommateur médian. La crise pourrait avoir un impact sur le consommateur riche, qui aura perdu beaucoup d'argent dans la baisse des Bourses et des titres financiers qu'il détenait. »
 
Les banques centrales pour redonner confiance
 
« Le retour de la confiance implique des actions déterminées de la part des banques centrales. Elles ont commencé à le faire, et j'espère qu'elles iront plus loin. Car si elles ne le faisaient pas, il existe effectivement un risque d'augmentation des taux d'intérêt sur les crédits aux particuliers et aux entreprises. Et cette augmentation aurait pour conséquence de ralentir la croissance économique. » 
 
« Le risque principal est bien celui du rationnement du crédit. Et ce risque ne pourrait être compensé que par une baisse des taux d'intérêt. Cela dans les semaines à venir. » 
 
« Le rôle fondamental des banques centrales aujourd'hui, c'est de faire passer par tous les moyens le message aux populations qu'elles ne laisseront pas les turbulences sur les marchés financiers affecter l'économie réelle, c'est-à-dire la croissance économique. Et elles disposent d'un instrument très puissant à cet effet : le taux d'intérêt. »
 
« Quand il y a crise de confiance, on ne peut rien faire d'autre que rassurer. Si en plus on a un instrument qui permet de le faire, il faut l'utiliser. En vous disant cela, je suis d'accord avec pratiquement tous les économistes de la planète, notamment les économistes américains. De droite, de gauche ou du centre. » 
 
Les interdépendances entre les phénomènes monétaires,
financiers et réels
 
« Les phénomènes monétaire et réel sont très interdépendants. On ne peut pas longtemps vivre sur l'illusion que la gestion du taux d'intérêt ne gouverne que l'inflation. La gestion du taux d'intérêt gouverne l'inflation et la croissance économique. Ce qui signifie que la politique monétaire est le lieu d'un arbitrage fondamental pour nos sociétés, qui doit conduire à des compromis entre inflation et croissance. »
 
 
L’intégralité du débat ici :
 
 
Le Monde, Débat avec Jean Paul Fitoussi,  président de l'OFCE,  mardi 11 septembre 2007 à 15 h00.
 
A consulter :
 
 
 
 
9 septembre 2007 7 09 /09 /septembre /2007 07:02
 
Dans ce billet et dans de nombreux autres billets qui suivront, je vais tenter de vous proposer un panorama, non exhaustif, des diverses interprétations de la crise financière internationale, de ses causes, de ses conséquences, et des moyens disponibles pour en réduire les effets pervers à court terme sans pour autant mettre en place les conditions de l’éventuelle prochaine crise financière. Conformément à l’esprit et aux objectifs de ce blog, le respect du pluralisme dans la durée sera une obligation.
 
Dans un premier temps, je m’appuierai sur des analyses contemporaines, proposées par quelques économistes. Ensuite, je reviendrai sur les diverses analyses théoriques que l’on peut faire de ce type de crises financières, monétaires et réelles.
 
La métaphore du train
 
Dans le présent billet, je vais d’abord partir d’une métaphore. Nous avons tous lus, un jour, sur les panneaux de signalisation situés avant un chemin de fer le célèbre rappel de prudence : « Attention : un train peut en cacher un autre ».
 
Selon la thèse défendue par Patrick ARTUS, de manière analogue, une crise financière peut en cacher une autre. Très simplement, il serait possible en luttant contre les pathologies présentes de créer les conditions d’occurrence des mêmes pathologies dans l’avenir. Cette observation, cette hypothèse, implique la gestion simultanée des impacts à court terme et à long terme de la crise.
 
Symptôme, maladie et causes profondes
 
D’un point de vue médical, on pourrait dire qu’il ne suffit pas de traiter uniquement les symptômes d’une maladie déclarée. Il ne suffit pas non plus de se contenter de soigner cette maladie. Il convient aussi de prescrire et d’appliquer un traitement de fond. En médecine, le traitement de fond, relève souvent de l’homéopathie qui est dans de nombreux cas à la recherche de terrains allergiques. Selon les principes homéopathiques, ce n’est qu’en traitant les causes profondes des manifestations symptomatiques allergiques qu’on pourrait parvenir, in fine, à soigner le malade à court terme, tout en prévenant les risques de réapparition du phénomène à moyen-long terme.
 
De la médecine à … l’économie
 
On peut traduire ce qui vient d’être énoncé dans le langage économique, ce qui nous amène à prendre en considération, non seulement les effets immédiats des médications prescrites, mais également les effets différés, ceux qui ne seront visibles que plus tard. La cohérence temporelle des décisions économiques est objet crucial de l’analyse économique mais également un des plus difficile à étudier. En effet, les acteurs économiques prennent leurs décisions et agissent dans une situation d’incertitude irréductible à partir d’un certain seuil, seuil de certitude dont on ne sait jamais vraiment ou il peut se trouver. La « certitude » étant très étroitement dépendante d’éléments rationnels, mais aussi de considérations irrationnelles comme les croyances, la confiance…
 
Il est donc particulièrement difficile de faire coïncider les exigences du court terme avec celles du long terme. Pour autant, il faut guérir à court terme tout en prévenant le retour de la maladie à long terme.
 
Mieux vaut prévenir que guérir ?
 
Régulièrement, nous entendons cette affirmation dans notre entourage et celle-ci tend à être appliquée à des situations très diverses. Pourtant, dans le domaine qui nous intéresse ici, celui d’une crise financière induite par un processus à la PONZI, il n’y a pas d’alternative, ni même de hiérarchisation possible entre guérison et prévention. Il faut courir après deux lièvres à la fois.
 
Dans un premier temps, il faut guérir. C’est inévitable. En effet, si on ne soigne pas le malade dans le présent, il sera peut être mort dans le futur et la question de sa santé durable (à long terme) ne se posera plus. La gestion de court terme est donc indispensable. C’est une condition préalable à la possibilité de la gestion du long terme. John Maynard KEYNES avait bien compris ce point en déclarant « A long terme nous serons tous morts ».
 
Dans un second temps, on doit cependant absolument prévenir, c'est-à-dire préparer l’avenir sans lui laisser le temps de s’écrire sur les lignes qui seraient imposées par le déterminisme d’un présent assis sur les figures du passé. C’est la gestion du moyen-long terme et l’application d’un certain principe de précaution. Les décisions prises dans le présent, n’engagent pas que le présent, elles engagent ipso facto l’avenir. Or, pour que l’avenir, ne se conjugue pas au passé, autrement dit pour que la maladie présente ne réapparaisse pas dans le futur, il convient de prodiguer au malade les soins appropriés à un rétablissement durable. J’observe, ici, que l’application d’un principe de précaution est tout à fait appropriée à la gestion de l’avenir, lequel est par nature frappé du sceau de l’incertitude.
 
Compte tenu des considérations qui viennent d’être exposées, quels enseignements pouvons-nous en tirer en ce qui concerne lez conséquences d’un processus financier cumulatif de type Finance de PONZI ?
 
La fin de la « Finance de PONZI » ?
 
Dans le billet intitulé « Les dangers de la « Finance de PONZI », j’avais souhaité montrer, en me basant sur les analyses de Patrick ARTUS, que la Finance de PONZI conduit inéluctablement au gonflement de bulles spéculatives qui gonflent avant de se dégonfler de manière souvent brutale et de causer des dégâts importants dans l’économie réelle.
 
Ce constat avait conduit Patrick ARTUS à s’interroger sur ce que deviendrait le système financier s’il était débarrassé de la Finance de PONZI. Selon le directeur de la RECHERCHE ECONOMIQUE chez NATIXIS, il en résulterait tout simplement, « une plus grande stabilité financière, l'absence de demande, donc la décote, des actifs émis antérieurement et liés à ce type de financement et une réduction du levier d'endettement, donc de la rentabilité des actifs financiers. » Que du positif, donc. Mais est-il vraiment réaliste de parier, de miser, sur la fin du « ponzisme » pour rétablir la stabilité financière et restaurer la sécurité dans l’économie réelle ? Ce n’est pas vraiment le cas. Dés lors, en vertu d’un principe de prudence et/ou réalisme, on devrait admettre que les mécanismes de la Finance de PONZI pourraient toujours trouver de nouveaux supports pour se glisser dans les nouvelles failles ouvertes par les innovations financières.
 
Dans ces conditions, il parait recommandé de se préparer à faire face aux probables difficultés futures que les nouvelles formes de la Finance de PONZI ne manqueront pas de dresser sur notre chemin. Mais, il y a loin de la coupe aux lèvres et s’il est relativement facile de se préparer à affronter des difficultés, il est autrement plus difficile d’y faire face, le moment venu, avec une réelle efficacité.  La question qui se pose est donc la suivante, pour Patrick ARTUS : « Comment arrêter une crise financière sans mettre en place les conditions d'apparition de la crise suivante ? » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
 
De la responsabilité de la politique monétaire
 
« Le problème qui se pose aujourd'hui à la Réserve Fédérale et à la BCE est le même que celui qui se posait en 2001-2003 : comment arrêter une crise financière une fois qu'elle est déclenchée sans mettre en place des conditions monétaires qui favoriseraient l'apparition de la crise suivante ? On peut en effet attribuer (en partie au moins) à la politique monétaire très expansionniste de la période 2001-2005, visant à corriger les effets de la crise boursière (des sociétés IT), l'apparition de la bulle d'endettement des ménages et de la bulle des prix de l'immobilier qui a explosé aux Etats-Unis (qui se corrige plus progressivement dans la zone euro) depuis 2006. La politique monétaire a donc fait "sauter" d'une crise de l'endettement des entreprises et des cours boursiers, à une crise de l'endettement des ménages et des prix de l'immobilier. Aujourd'hui, comment limiter l'extension de la crise de l'immobilier aux autres actifs sans mettre en place les conditions de la crise suivante ? » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
 
L’hypothèse avancée, par l’économiste de NATIXIS, est que la crise financière actuelle serait le résultat différé d’une politique monétaire excessivement expansionniste dans le temps. Autrement dit, le maintien d’une politique monétaire expansive durable serait à l’origine d’une « dynamique infernale » qui permet de sortir d’une crise mais à condition d’en payer le prix plus tard en acceptant d’entrer dans une autre crise financière, ailleurs.
 
« La dynamique infernale »
 
L’existence de cette « dynamique infernale » nous conduit à examiner d’une part, l’origine du mécanisme qui déclenche à terme la crise et d’autre part, les conditions de sa propagation d’un marché d’actifs à l’autre. L’ordre de la séquence est important. On doit d’abord identifier les facteurs qui portent en eux le potentiel de déclenchement avant de les contrôler. Ensuite, on peut tenter de repérer les différents canaux de transmission qui participent à la contagion. 
 
« Nous appelons "dynamique infernale" la réaction de la politique monétaire aux crises financières et ses effets ultérieurs. Lorsqu'une crise financière (correction d'un excès d'endettement, d'un excès de hausse des prix d'actifs) survient, la politique monétaire devient très expansionniste, ce qui est raisonnable : il faut éviter l'extension de la crise ; une crise systémique des banques, le rationnement du crédit, les pertes patrimoniales excessives… Mais puisque la politique monétaire devient très expansionniste, elle favorise la croissance de l'endettement et des prix d'actifs à un autre endroit de l'économie. La réaction légitime à une crise génère donc les conditions de la crise suivante, selon la dynamique suivante : »
Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
Le facteur déclencheur, le détonateur, est ici la politique monétaire expansionniste mise en œuvre pour lutter contre la crise financière présente. La contagion va se nourrir du maintien d’un politique monétaire expansionniste, qui en facilitant l’endettement va conduire à la survalorisation des actifs sur les différents marchés. Nous l’avons déjà dit, cette survalorisation se traduit par l’apparition d’une bulle spéculative…, qui en éclatant exige l’alimentation du marché en liquidité par le biais d’une politique monétaire expansionniste, …
 
De la bulle technologique (2001-2003)
à la bulle immobilière (2006-2007)
 
Dans la perspective d’analyse proposée par Patrick ARTUS, c’est la lutte contre les effets dévastateurs de la bulle technologique au tournant des années 2000, avec un usage excessif (au sens de trop durable) de l’expansion monétaire, qui a produit, graduellement, les conditions d’occurrence de la crise de l’immobilier américain en 2006-2007.
 
« La décennie 2000 commence par la crise des sociétés des nouvelles technologies. Durant les dernières années de la décennie 1990, la politique décennie 2000 : la politique monétaire reste assez expansionniste (…). Ceci permet une expansion rapide de l'endettement des entreprises qui sert à financer outre les investissements, les rachats d'actions aux Etats-Unis, les acquisitions. Cette aisance monétaire, les achats d'actions induits, poussent à la hausse les cours boursiers, conduisent donc à ce que les acquisitions (les achats d'actions de toutes formes) soient faites à des niveaux de valorisation très élevés, en particulier dans le secteur des nouvelles technologies. Dans cette période, malgré les niveaux très élevés de valorisation, non seulement les entreprises (par les rachats et les acquisitions) mais aussi les investisseurs institutionnels, sont collectivement et massivement acheteurs d'actions, ce qui aussi est facilité par la politique monétaire expansionniste. Lorsque la bulle actions éclate, la crise se transmet à l'économie réelle par l'intermédiaire des comptes des entreprises. La perte de valeur des actions affecte en effet assez peu le taux d'épargne des ménages, qui ont le sait, résiste aux Etats-Unis aux moins-values en capital. Mais elle réduit la valeur des actifs détenus par les entreprises (après les acquisitions…), rend donc l'endettement des entreprises excessif, et les force, pour se désendetter à réduire leur investissement et leur emploi, d'où la récession. La récession ainsi déclenchée par la réaction des entreprises à la chute des cours boursiers (à l'explosion de la bulle IT) est, on le sait, amplifiée par le 11 septembre 2001 et plus tard par la guerre en Irak. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
 
La transition entre les deux crises de la décennie 2000
 
En réaction à la crise de la « nouvelle économie », qui se traduit parune très forte hausse des défauts des entreprises, les banques centrales américaine (FED, réserve fédérale) et européenne (BCE) mènent des politiques monétaires très expansionnistes, surtout aux Etats-Unis, afin de contrecarrer l’éventualité d’une situation d’assèchement du marché du crédit : le crédit crunch.
 
Le problème est que cette politique, si elle permet d’éviter le pire des scénarios à court terme, va ouvrir la voie avec environ 2 ans de décalage, à une forte poussée de l'endettement des ménages, en particulier l’endettement hypothécaire pour l’achat immobilier, puis celui des entreprises. Cette hausse de l'endettement hypothécaire des ménages alimente la demande sur le marché immobilier (demande dans le secteur de la construction), laquelle provoque inéluctablement une hausse des prix des biens immobiliers. De surcroît, étant donné le fonctionnement du système d’endettement pour l’achat immobilier aux Etats-Unis (cf. le billet, « les dangers de la Finance de PONZI »), les plus-values en capital réalisées sur les reventes (effectives ou potentielles) de biens immobiliers augmentent les possibilités d'endettement des ménages. On retrouve, le cercle vicieux de la Finance de PONZI et ses effets potentiellement explosifs.
 
Aux Etats-Unis, « ce boom immobilier » aboutit à une crise liée notamment au crédit subprime. En revanche en Europe, on assiste seulement à (un arrêt du cycle de la construction dans la zone euro.) 
 
La crise financière aux Etats-Unis se traduit par :
- un fort recul de l'activité de construction car le niveau du stock de logements invendus reste très élevé (lebas niveau des taux d'intérêt ayant incité les promoteurs (dévelopers) à offrir davantage de logements)
- une forte baisse de la demande de logements par les ménages (dont les prix sont en forte hausse)
- Un belle chute des prix des maisons qui fait disparaître les possibilités d'endettement  (dévalorisation de l’actif servant de garantie de prêt)
- Un durcissement des conditions de crédit aux ménages par les banques qui se traduit par une réduction de leur capacité de consommation
- La crise du subprime avec les défauts d'emprunteurs à revenu faible (lorsque leurs crédits passent aux taux de marché en raison de la disparition des plus values sur l'immobilier)
 
Dans la zone euro, il n'y a pas crise stricto sensu, mais un retournement du cycle immobilier. On y observe un ralentissement rapide du crédit aux ménages, un arrêt de la hausse des prix, une stabilisation des permis de construire. Mais, à la différence des Etats-Unis, les taux de défaut des ménages restent bas.
L'épineux problème de la contagion
 
« La crise du subprime s'est ensuite étendue à l'ensemble des marchés financiers : crédit ; dérivés de crédit ; actions ; ABS ; interbancaire. Cette transmission s'est faite par plusieurs canaux : la présence de crédits subprime dans des actifs titrisés et structurés ; la montée de l'aversion pour le risque des banques et des investisseurs ; les ventes forcées par des fonds à levier d'endettement… » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
 
Une fois la crise financière enclenchée sur un marché devenu trop spéculatif, l’objectif devient la lutte contre les phénomènes de contagion. Mais « comment éviter la dynamique infernale ? »
 
Dans un premier temps, les banques centrales doivent absolument éviter les réactions en chaîne conduisant à une crise systémique des banques. « Les banques centrales doivent donc injecter les liquidités nécessaires (…) pour éviter des défauts de paiement de banques, si possible un "credit crunch" ». Mais elles doivent aussi éviter de faire apparaître les conditions de déclenchement de la crise suivante, comme nous l’avons rappelé plus haut.
 
« Credit crunch » ou bulle financière future ?
 
La complexité de cet arbitrage entreles nécessités ducourt terme (pas de credit crunh) et les exigences dulong terme (prévention contre une bulle potentielle future) est telle que le type de "dynamique infernale" décrit par Patrick ARTUS, se reproduit régulièrement comme cela a été rappelé à plusieurs reprises. Mener une politique monétaire équilibrée dans le cadre financier actuel est devenu un exercice de haute voltige. 
 
Marier avec harmonie des exigences temporelles, apparemment contradictoires, implique de repenser la combinaison entre les objectifs de la politique monétaire et les instruments permettant d’atteindre ces objectifs.
 
Inflation, endettement et évolution du prix des actifs
 
Visiblement, les autorités monétaires ne peuvent plus se contenter de contrôler l’inflation sur le marché des biens et services. Elles devraient prendre en considération avec beaucoup de rigueur l’évolution comparée de l’endettement et des prix des actifs financiers, immobiliers…
 
Finalement, pour éviter ou au moins réduire les effets sur l’économie réelle des crises financières, il convient selon Patrick ARTUS que :
 
Les banques centrales, en cas de crise, répondent sans attendre à la forte demande de liquidités des banques (les banques centrales peuvent exploiter cette possibilité d’injection de liquidités tant qu’il existe un écart entre les taux interbancaire et les taux d'intervention des banques centrales) pour éviter une crise systémique des banques) tout en faisant en sorte de maintenir des taux d'intervention assez élevé (pour empêcher le départ de la nouvelle bulle d'endettement et de prix des actifs).
 
On sait, selon Patrick ARTUS, que les banques centrales définissent le profil (le timing) de la remontée des taux d'intérêt après une période d'expansion monétaire en fonction du profil du risque inflationniste (de l'inflation observée, du taux de chômage, du taux d'utilisation des capacités) et du profil de l'endettement, qu’elles établissent. Elles pourraient calquer le profil de la remontée des taux d'intérêt après une période d'expansion monétaire davantage sur celui des taux d'endettement (du crédit au secteur privé) et moins sur celui des déterminants supposés de l'inflation.
 
Enfin, « la politique économique pourrait utiliser bien d'autres instruments que les taux d'intérêt à court terme pour lutter contre l'excès d'endettement ou les bulles des prix des actifs : réserves obligatoires plus élevées sur certaines catégories de crédit (possibilité utilisée dans le passé et qui a disparu) ; gestion dans le cycle des ratios de capital des banques pour éviter qu'elles prêtent trop facilement en période d'expansion économique et de hausse des marchés financiers ; taxation plus forte de certaines plus-values en capital. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 4 septembre 2007, N° 319
 
A suivre, …
 
A consulter :
 
 
 
4 septembre 2007 2 04 /09 /septembre /2007 20:59
 
Lors de son intervention, jeudi 30 août 2007 auLycée Louis Le Grand, dans le cadre de la quatrième rencontre entre les professeurs de sciences économiques et sociales et des dirigeants d’entreprises - « Les Entretiens Louis Le Grand » - Patrick ARTUS a expliqué que la crise financière internationale est une crise bancaire classique dont les effets sur le système financier international sont disproportionnés par rapport à son origine, la crise des crédits Subprime aux Etats-Unis. De plus, il estime que l’essentiel de cette crise est devant nous.
 
Enfin, il nous a expliqué que cette crise du Subprime est un avatar de la « Finance de PONZI ».
 
C’est avec une grande aisance et beaucoup de pédagogie quePatrick Artus a fait son exposé devant plusieurs centaines de professeurs de sciences économiques et sociales, captivés. J’invite au passage tous mes collègues de SES à s’inscrire à une prochaine session des « Entretiens Louis Le Grand », colloque proposé depuis quatre ans par l’Institut de l’entreprise (IDE) dont le président est Michael PEBEREAU et le Ministère de l’éducation nationale.
 
Dans ce billet, je vais essayer d’expliciter ce qu’on en entend par « Finance de PONZI » en me basant notamment sur les travaux de Patrick ARTUS.
 
Qu’est-ce que la « Finance de PONZI » ?
 
Charles PONZI était un américain, qui en 1920 à Boston, « promettait des rendements très importants aux investisseurs et les payait avec les fonds reçus des investisseurs suivants. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
« La "finance de PONZI" est une situation où la solvabilité d'un agent économique (d'un emprunteur) n'est pas assurée par ses flux futurs de revenus, qui ne couvrent pas sa dette présente. Elle n'est assurée que s'il peut se réendetter périodiquement pour faire face au service de sa dette, par exemple s'il détient des actifs dont le prix augmente à un rythme supérieur au taux d'intérêt et qui servent de garantie à cet endettement. Mais cette situation n'étant pas durable, la finance de Ponzi finit normalement en un défaut de l'emprunteur. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Comment fonctionne la finance de PONZI ?
 
Dans le cadre d’une Finance de PONZI, un actif immobilier, ou financier, ou …, est mis en vente sur le marché. L’investisseur (futur acheteur) peut emprunter dans des conditions avantageuses, et il a même intérêt à le faire lorsque les taux d’intérêt sont bas (surtout au début de la période de remboursement), pour acquérir cet actif dont la valorisation est une hypothèse probable.
 
L’emprunt pour acheter va de facto soutenir la demande de cet actif, et logiquement, le prix va augmenter. C’est ce qu’on peut appeler des anticipations auto-réalisatrices. Les premiers investisseurs achètent parce qu’ils anticipent la hausse, or en achetant en masse, ils alimentent la demande, la quelle va susciter une hausse du cours. Dans ce système, l’endettement va avoir un fort effet de levier. Plus les investisseurs vont s’endetter pour acheter, plus la valorisation attendue sera réalisée et plus ils pourront s’endetter pour acheter d’autres actifs plus chers mais ayant un potentiel d’augmentation intact… Au passage, l’emprunteur-acheteur-vendeur encaisse une plus value intéressante, ce qui l’incite à en vouloir toujours plus. Gourmandise, quand tu nous tiens !
 
Cet enchaînement endettement-achat-vente-endettement est possible tant que la confiance règne entre les différents intervenants sur le marché considéré. Tant que chaque investisseur pense qu’il pourra revendre son actif à un prix plus élevé que le prix d’achat, il sera incité à emprunter puis à réemprunter, tandis que les créanciers seront incités à prêter puis faire crédit à nouveau, tant qu’ils penseront que leurs débiteurs pourront rembourser leur dette en liquidant leurs actifs. La capacité à souscrire un nouvel emprunt est bien fonction des anticipations de valorisation futures. Et, donc, çà continue encore et encore, c’est que le début, d’accord, d’accord….
 
Dans un tel système on observe clairement que la confiance des créanciers et des investisseurs repose sur le potentiel de valorisation de l’actif. Cela veut dire que dans un tel cadre, la solvabilité des débiteurs (capacité à faire face aux engagements à rembourser, et dans un premier temps à payer les intérêts de la dette, le service de la dette) ne dépend pas d’un flux presque certain de revenus futurs, mais dépend de la valorisation par définition incertaine de l’actif considéré.
 
La gourmandise est un vilain défaut
 
Un tel enchaînement, très spéculatif, ne peut aboutir qu’au gonflement d’une bulle financière, qui finit toujours par se dégonfler. Le prix de l’actif monte, monte encore, les montants empruntés montent et montent encore…, et tout le monde sait que la situation va se retourner, mais personne ne sait quand. Dés l’instant ou quelques agents, investisseurs et/ou créanciers, perdent confiance dans la capacité du système à reproduire la hausse (encore une fois), la bulle éclate et les conséquences négatives se cumulent…
 
A force de faire des paris insensés sur l’avenir, à force d’en vouloir toujours plus, à force d’être de plus en plus gourmand, on risque de tout perdre. Cela est toutefois très logique car dés l’instant ou le risque de gagner beaucoup est gros, l’inverse est également vrai. Le risque de perdre, de tomber est grand. Plus dure sera la chute.
 
Concrètement, le retournement se traduit par des situations d’insolvabilité en chaîne. Comme dans un jeu de domino, les premiers tombés vont provoquer la chute des autres… Les premières défaillances d’emprunteurs vont se manifester quand ceux-ci vont vendre leurs actifs à un prix inférieur au prix d’acquisition. Dans ces conditions, ils ne peuvent plus faire face à leurs engagements vis-à-vis de leurs créanciers. Ils sont insolvables. En conséquence de la multiplication des situations d’insolvabilité, des créanciers vont déposer le bilan. Cela va se traduire par une restriction des possibilités de prêts, de crédit, et provoquer une chute de la demande d’actifs au moment même ou sur le marché, l’offre d’actif augmente. La conjugaison des deux implique une baisse des prix des actifs. Et la spirale baissière peut s’approfondir si les banques ne reçoivent pas le soutien des banques centrales qui peuvent leur fournir les liquidités suffisantes afin de poursuivre leur activité de crédit et ainsi éviter que les prix des actifs ne tombent trop bas et que les défaillances se multiplient encore.
 
Au feu, … le pompier…
 
Dans ce type de situation, les banques centrales jouent le rôle de pompier, de préteur en dernier ressort. En alimentant le marché en liquidités, elles peuvent faciliter la sortie de crise. Mais, si la situation d’accroissement des liquidités persiste au-delà de ce qui est nécessaire, le pompier devient un pyromane. Dans le cadre de la Finance de PONZI, le pompier est en fait un pyromane en puissance. Nous y reviendrons, mais on peut dire en quelques mots qu’en persistant à fournir des liquidités quand elles ne manquent plus, les banques centrales peuvent semer les graines de la bulle financière future qui ne manquera pas de gonfler, puis d’éclater.
Si les marchés financiers ont besoin d’être arrosés de liquidités et de recevoir les rayons du soleil de la spéculation raisonnée, la combinaison « trop de soleil et trop de pluie » est dangereuse. Elle se traduit inévitablement par une croissance incontrôlée qui porte en elle les germes de sa future destruction. IL faut donc bien prendre garde aux contradictions internes, aux interactions endogènes négatives, et bien distinguer les effets de court terme des interventions des banques centrales, des effets de moyen-long terme.
 
Finance de PONZI : un problème de critère de solvabilité
 
« La solvabilité intertemporelle d'un emprunteur est assurée quand sa dette actuelle est inférieure à la somme actualisée de ses revenus futurs (ou de ses revenus futurs utilisables pour assurer le service de sa dette). Dans le cas de finance de Ponzi, ce n'est pas le cas. L'emprunteur doit se réendetter périodiquement pour faire face au service de sa dette. Ceci est le cas le plus souvent lorsque la dette permet d'acheter un actif (immobilier, financier). Tant que le prix de l'actif augmente à un rythme supérieur au taux d'intérêt, il est possible d'utiliser l'actif comme garantie hypothécaire (collatéral) pour obtenir un supplément de dette et assurer le service de la dette antérieure. Mais on ne peut imaginer qu'à l'équilibre le prix d'un actif croisse durablement à un taux supérieur au taux d'intérêt, une fois faite la correction pour le risque. Ceci implique que cette situation de rendement périodique basé sur les plus values en capital doit cesser, et qu'alors l'insolvabilité apparaît.  » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Ipso facto, ce constat conduit à s’interroger sur la manière de mesurer la solvabilité d'un emprunteur. Doit-on tenir compte de sa richesse nette ou de ses flux de revenu futurs ?
 
«… le fait que la richesse nette (écart entre les actifs et les dettes) soit positive (ce qui est largement le cas globalement aux Etats-Unis pour les ménages) n'assure pas nécessairement la solvabilité. En effet, il peut y avoir une rupture dans l'évolution du prix de l'actif qui fait disparaître cette solvabilité apparente en stocks, comme cela a été dans le cas des mortgages subprime (…)  De plus, si tous les emprunteurs en difficulté vendent des actifs, leur prix chute, ce qui aggrave le problème de solvabilité en rendant impossible le réendettement basé sur les plus-values en capital. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
De la solvabilité stock (d’actif) à la solvabilité flux (revenus)
 
La seule définition de la solvabilité qui soit robuste est donc la solvabilité fondée, calculée à partir des flux de revenus futurs. Dans ce cas, « à chaque instant la dette d'un agent économique est inférieure à la somme actualisée de ses revenus futurs mobilisables pour assurer le service de la dette. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Par principe de précaution, relativement aux effets potentiellement dévastateurs de la Finance de PONZI, Patrick ARTUS insiste pour que le critère de solvabilité revenu soit privilégié par les créanciers. Pourtant, il constante, non sans étonnement que les cas de Finance de PONZI sont récurrents depuis le début des années 90 et qu’ils sont en bonne partie à l’origine des dernières crises financières, avec tous les effets pervers sur l’économie réelle.
 
Malgré les dangers connus, la Finance de PONZI se reproduit
 
« La finance de Ponzi amène nécessairement le défaut de l'emprunteur puisque, au-delà des phénomènes des bulles de court terme, le rendement d'un actif financier est égal au taux d'intérêt sans risque accru de la prime de risque nécessaire. Malgré cette évidence, et la constatation que c'est exactement cela qui se produit dans la pratique, les banques ont financé des montages correspondant à la finance de Ponzi à plusieurs reprises.  Elle a été fréquemment utilisée même au niveau macroéconomique depuis le début des années 90 » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Trois exemples récents de finance de Ponzi
 
Bulle technologique et nouvelle économie
 
Ainsi, selon Patrick ARTUS,labulle technologique (celle de la « nouvelle économie », qui a pris un coup de vieux en peu de temps) serait un cas d’école de Finance de PONZI. La leçon est donc récente, mais les enseignements n’ont visiblement pas été tirés.  « Au moment de la bulle des nouvelles technologies (entre 1996 et2000), le crédit aux entreprises et leur taux d'endettement croissent très rapidement aux Etats-Unis et en Europe pour financer des acquisitions faites à des niveaux de valorisation extraordinairement élevés surtout dans la IT. Les prêteurs et les emprunteurs ne pouvaient pas avoir l'illusion que, à ces niveaux de valorisation, les revenus fournis par les entreprises acquises pourraient suffire à assurer le service de la dette. Ils comptaient sur la poursuite de la hausse de la valeur des acquisitions faites, soit pour les revendre, soit pour servir de collatéral à un supplément de dette. Lorsque la bulle IT a explosé, beaucoup d'entreprises se sont retrouvées insolvables, les autres ont dû se désendetter, d'où le recul de l'investissement et de l'emploi. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
La crise des crédits immobiliers subprime aux Etats-Unis
 
Moins gênante, pour la France et pour l’Europe, la crise des crédits hypothécaires subprime aux Etats-Unis a peu de chance de voir le jour dans nos contrées. Cela reste pourtant un bel exemple de Finance de PONZI. « On sait que beaucoup d'emprunteurs en subprime aux Etats-Unis ne peuvent pas rembourser leurs crédits (et payer les intérêts contractuels qui montent après quelques années de crédit) avec leurs revenus. Tant que les prix des maisons augmentaient, la solution était soit de vendre la maison achetée avec une plus value pour rembourser le prêt, soit de contracter un supplément d'endettement basé sur le gain en capital sur la maison, et permettant d'assurer le service de la dette. Mais lorsque les prix des maisons ont commencé à baisser avec l'excès de construction et l'apparition d'un énorme stock de maisons invendues, cette solution a disparu, et les défauts en subprime se sont multipliés. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Private equity, capital transmission et LBO
 
En revanche, les LBO présentent tous les aspects d’une Finance de PONZI. Ceci est beaucoup plus gênant parce que ce type activité s’est largement développé en France en particulier, ces dernières années. « L'activité de LBO s'est beaucoup accrue dans la période récente. Mais, de plus en plus, le rendement du private equity est assuré par la revente des entreprises détenues en portefeuille par un fonds à d'autres fonds à un prix plus élevé (à un multiple plus élevé) que le prix d'achat. Ceci explique la hausse de l'endettement des fonds de private equity, cet endettement finançant les achats-ventes faits à des valorisations de plus en plus élevées. Ici aussi, il s'agit bien d'une finance à la Ponzi où l'endettement lié à l'achat d'une entreprise par un fonds ne peut être remboursé que si cette entreprise est revendue à une valorisation plus élevée, pas seulement avec les profits de l'entreprise. » Patrick ARTUS, RECHERCHE ECONOMIQUE NATIXIS, FLASH Marchés du 28 août 2007, N° 304
 
Partant du constat que la Finance de PONZI conduit inéluctablement aux gonflements de bulles spéculatives qui finissent toujours par se dégonfler plus ou moins brutalement et occasionnant de nombreux dommages collatéraux dans l’économie réelle, Patrick ARTUS se demande quel serait l’impact de la fin de la Finance de PONZI.
 
« Que se passerait-il si la finance de Ponzi disparaissait ? »
 
Il en résulterait tout simplement, « une plus grande stabilité financière, l'absence de demande, donc la décote, des actifs émis antérieurement et liés à ce type de financement et une réduction du levier d'endettement, donc de la rentabilité des actifs financiers. »
 
Ceci étant, Patrick ARTUSn’étant pas naïf, ne croit pas à la fin de la Finance de PONZI parce qu’il pense que celle-ci pourra toujours trouver de nouveaux supports pour prospérer, trouvera toujours le moyen de se loger dans les « trous noirs » des innovations financières. « Il est possible que le même type de financement avec solvabilité liée aux plus values en capital sur les actifs détenus par l'emprunteur se reproduise dans le futur avec un support autre que l'immobilier : à nouveau actions IT, ou émergents… »
 
C’est donc dans ce sens qu’il faut comprendre la formule : « la crise financière internationale actuelle est une crise bancaire classique »
 
Nous reviendrons dans de prochains billets sur le constat selon lequel les effets sur le système financier international sont disproportionnés par rapport à son origine, la crise des crédits Subprime aux Etats-Unis. Nus poursuivrons en montrant pourquoi il est possible de considérer que l’essentiel de cette crise est devant nous.
 
Complément sur les LBO
 
Il n’existe pas en France d’équivalent des crédits subprimes. Mais il existe les LBO. Les LBO concernent des opérations risquées entre des banques et des entreprises non cotées en bourse. Si ce type de financement se développait davantage, il porterait en lui un risque potentiel élevé.   
                                                                                                                             « En fait, l’essor des opérationsdecapital investissementou private equitydans l’évolution capitalistique des entreprises et des groupes en Europe, a favorisé l’essor des LBO. Le capital investissement désigne l’ensemble des opérations en fonds propres ou quasi fonds propres dans des sociétés non cotées en bourse, et cela quel que soit leur stade de développement. « Le capital investissement peut prendre plusieurs formes selon qu'il intervient à la naissance de l'entreprise (capital risque), à son décollage (capital développement) ou à sa maturité (capital transmission).                                                                                                     
 
LBO et capital transmission : « C'est dans le cas du capital transmission que les opérations ont connu un essor remarquable sur la période récente avec les opérations de LBO qui offrent des opportunités importantes de création de valeur. Le capital transmission implique l'intervention d'investisseurs extérieurs.L'opération la plus courante étant le rachat avec effet de levier, appelé LBO (Leveraged buy ouf). Lorsque l’acheteur provient de l'entreprise elle-même, on parle de LBI ou Leveraged buy in.
 
Cette opération consiste à racheter la société avec un apport limité en fonds propres assorti d'une dette au moins équivalente. Le remboursement de la dette se fait via l'activité de l'entreprise. En d'autres termes, une société holding se constitue et s'endette pour racheter l'entreprise. Les flux de trésoreries de cette dernière sont ensuite rapatriés vers la holding sous forme de dividendes qui lui permettront alors de payer les intérêts et de rembourser la dette.
 
Dans le contexte actuel où les trésoreries des entreprises sont restaurées et les bilans assainis, les opportunités de LBO peu risquées fleurissent. Elles se révèlent d'autant plus attractives que les taux d'intérêt sont bas, bien que majorés de primes de risque. Les banques apprécient particulièrement ce type d'opérations : d'une part, parce qu'elles s'octroient des commissions de montage confortables (environ 2 % du prix de l'acquisition), d'autre part, parce qu'elles pratiquent des taux d'intérêt supérieurs à ceux qu'elles accordent aux industriels (environ 175 points de base en plus, les risques liés aux LBO étant jugés plus grands).
 
De sorte que certains évoquent le risque d'une bulle d'endettement dans le sens où les prêts seraient accordés un peu trop facilement par les banques, ces dernières finançant parfois des opérations de LBO, à hauteur de 80 %, par l'endettement. Conscientes de ce risque, certaines banques revendent d'ailleurs une partie de leurs créances sur le marché de la dette à des investisseurs à la recherche de forts rendements (fonds spéculatifs). »
« Les entreprises françaises en 2005 », Chrsitian de Boissieu, Carole Deneuve
 
 
A consulter :
 
 
 
24 août 2007 5 24 /08 /août /2007 15:10
 
Boom, bulle, krack, crise
 
« Il faut avoir le pessimisme de la raison et l’optimisme de la volonté »
Michel Barat
 
Remarques préliminaires
 
Dans un court billet, j’ai voulu répertorier les articles proposés sur divers blogs et qui permettent d’expliciter les différents aspects de la crise des crédits hypothécaires, les « subprime », aux Etats-Unis. Etant donné, la qualité des textes proposés, il me semble inutile d’être redondant. J’ai donc souhaité présenter sommairement tous ces articles. Si certains lecteurs ont trouvé d’autres articles utiles à la compréhension de cette crise, qu’ils me le disent, je rajouterai des liens.
 
 
En ce qui me concerne, je souhaite aborder la question d’un autre point de vue.
 
Crise financière,… ou crise réelle ?
 
Selon les cassandres, nous sommes probablement à l’aube, au minimum, d’une récession économique généralisée à la plupart des pays développés et émergents de la planète, en raison de la crise financière qui a démarré aux Etats-Unis avec la crise du crédit à risque, le « subprime ». En revanche, selon des analyses plus optimistes, il s’agit simplement d’une période d’ajustement inhérente aux « exubérances irrationnelles » passées, aux excès passés.
Alors, sommes nous au début d’une crise économique internationale profonde ? Ou bien, nous trouvons nous dans une phase de transition, entre deux équilibres, par définition instable ?
 
Pour répondre à cette question, ou au moins  tenter d’y apporter quelques réponses, on peut commencer par se demander pourquoi les crises financières suscitent toujours tant de craintes, éveillent tant de passions, ouvrent tant débats ?
 
La première réponse, immédiate, est partiellement contenue dans la question posée dans le titre. En effet, pourquoi cette question introductive n’en est pas vraiment une ?
 
Tout simplement parce que les crises financières ont (toujours et forcément) des effets réels ! Si tel n’était pas le cas, le sujet serait probablement moins étudié et chacun d’entre nous s’interrogerait moins sur les effets (réels) potentiels de ces crises qualifiés de financières.
 
Sphère réelle et sphère financière : déconnexion ?
 
La question de la connexion/déconnexion entre la sphère financière et la sphère réelle de l’économie est pourtant une question récurrente, que se posent les économistes, les dirigeants politiques, les dirigeants d’entreprises, les salariés, etc …
 
L’épisode actuel pourrait le montrer clairement et cruellement. Les erreurs de choix et de comportements des agents sur les marchés financiers et les déséquilibres financiers associés pourraient avoir des conséquences majeures sur les acteurs et leurs opérations dans l’économie réelle.
 
Les faillites bancaires, les défaillances successives d’organismes de crédit, les licenciements, les ménages devenus insolvables et en cessation de paiement, sont les premières preuves indiscutables de l’interdépendance entre les sphères réelles et financières de l’économie.
 
Toutes les crises financières, qu’il s’agisse d’une crise change, d’une crise bancaire, d’une crise de dette, d’une crise boursière, sont susceptibles de provoquer une récession, voire une dépression dans la sphère réelle.
 
Une interdépendance sans surprise
 
Cette interdépendance, entre les sphères réelle et financière, ne devrait pourtant surprendre personne car toutes les activités économiques, dans une économie capitaliste de marché doivent être financées.
 
La sphère réelle regroupe l’ensemble des activités de production et de répartition des biens et services, les opérations d’échanges des facteurs de production,… La sphère de la finance correspond à l’ensemble des opérations et des institutions permettant d’organiser les relations entre les agents qui disposent de capacités de financement avec ceux qui ont des besoins de financement.
 
Les opérations réelles sur les biens et les services (production et échange) les opérations sur les facteurs de production (le travail et le capital productif) nécessitent des moyens financiers. Toutes les activités économiques réelles nécessitent un financement préalable. Les échanges de capacité de financement entre les agents à besoin de financement (emprunteurs, débiteurs) et les agents à capacité de financement, sont la contrepartie indispensable des opérations dans la sphère réelle de l’économie. Par exemple, une entreprise devra emprunter pour invertir ou moment de sa création ou au cours de son activité. Un ménage devra emprunter pour un achat immobilier,…
 
D’un point de vue macroéconomique, l’épargne des ménages (agent structurellement préteur, c’est à dire disposant d’une capacité de financement), va permettre de financer les investissement des entreprise et des administrations (agents structurellement emprunteurs). Il y a donc dans notre économie des agents qui sont des créanciers structurels et d’autres qui sont des débiteurs structurels.
 
Comme, de surcroît, nos économies sont des économies monétaires, les échanges financiers et réels sont libellés et réalisés en monnaie.  D’où l’importance de la valeur interne et de la valeur externe de la monnaie pour stabilité du système. Les déséquilibres monétaires peuvent être la cause ou la conséquence de déséquilibres financiers et/ou réels.
 
Dans ces conditions, lorsque la croissance économique ralentie, cela signifie que la croissance la production intérieure brute (PIB) est plus lente. Les besoins en main d’œuvre sont moindres et le chômage augmente entraînant dans son sillage tout un cortège habituel d’inégalités. A fortiori, dans le cas d’une dépression, la production baisse et les difficultés économiques et sociales se renforcent. En outre, le ralentissement, voire la baisse, de l’investissement en capital productif peut contribuer à accélérer le processus récessif, ou dépressif.
 
Système et interdépendances
 
L’économie, nationale, régionale ou mondiale, prend donc la forme d’un système dans lequel les diverses composantes, les multiples éléments(agents et opérations) sont plus ou moins en interaction avec les autres composantes, éléments et avec le système lui même. En fait, depuis le début des années 80, diverses évolutions (révolutions pour certains) ont contribué à multiplier les phénomènes interactifs et donc la (sur)réactivité du système.
 
De la finance directe à la finance indirecte
 
En effet, les multiples révolutions financières quantitatives (phénomènes de capitalisation) et qualitatives (essor de nouveaux marchés et émergence de nouveaux acteurs), les processus de déréglementation, désintermédiation, décloisonnement et d’innovations, ont favorisé le passage d’une économie d’endettement (finance indirecte) à une économie de marchés financiers (-finance directe et titrisation).
 
Dans le cadre d’une économie d’endettement, les agents à capacité et à besoin de financement réalisent leurs opérations financières par le biais d’un intermédiaire financier (le plus souvent une banque) et dans le cadre d’une économie de marchés financiers, les deux catégories d’agents se rencontrent directement sur les différents marchés de capitaux. En théorie, cela se passe ainsi, mais on constate que les banques et les autres organismes financiers se sont adaptés à l’économie de finance directe et y jouent un rôle majeur et fondamental. Les banques restent au cœur du déclenchement de la crise du « subprime » aux Etats-Unis.
 
Cet essor de l’économie financière de marché est d’une telle ampleur que les montants échangés sur les différents marchés de capitaux (marchés financiers et marché monétaire) sont désormais sans commune mesure avec les opérations et les échanges dans l’économie réelle.Et cette nouvelle réalité pose, de facto, de nombreux problèmes.
 
Finance globalisée et autonomie de la sphère financière
 
Partant de ce constat, on peut se demander dans quelle mesure la finance reste au service de l’économie réelle, ou dans quelle mesure les marchés financiers sont-ils déconnectés, autonomes, de l’économie réelle.
 
En fait, il semble que la déconnexion existe surtout à court terme, mais que la connexion se rétablit à long terme.Pour autant, ce découplage de court terme n’est pas sans incidences durables par le biais d’un phénomène d’hyteresis selon lequel l’effet persiste alors que sa cause (le facteur déclencheur) a disparu. Dans le cas présent, les effets financiers et réels de la crise initiée par les défaillances du système du crédit « subprime », persistera plusieurs mois, voire plusieurs années, alors que les « mauvais créanciers » et les « mauvais débiteurs » auront déjà payé la note.
 
Boom, Mimétisme, Bulles spéculatives et Krack
 
En tentant d’être plus clair,on peut dire que dans le cadre de la finance globalisée, la mobilité accrue des capitaux, l’arrivée des économies émergentes de plus en plus nombreuses à la table de la croissance mondiale et des échanges internationaux de biens et services, et de capitaux, l’horizon court des spéculateurs liée à l’incomplétude informationnelle à long terme (l’avenir est incertain), la myopie des agents sur les différents marchés qui se traduisent par des comportements « panurgiens » ( moutonniers ou mimétiques), le rôle central des anticipations qui sont donc de moins en moins rationnelles (sauf si la rationalité consiste à adopter le même comportement que les autres), la diversification des produits financiers et notamment la multiplication des produits dérivés (de produits financiers dits « sous jacents »),… conduisent à exacerber les phénomènes de « surréaction » se traduisant par l’envolée des cours de différents produits. Ces bulles spéculatives, alimentées par le fait que la hausse entraîne la hausse, finissent toujours par atteindre un seuil au-delà duquel la baisse prend la forme d’une chute brutale et vertigineuse des cours. C’est le Krack. A prés le boom, …le krack !
 
Du risque systémique
 
On déduit, logiquement de ce qui précède, que la crainte d’une crise systémique lorsqu’un déséquilibre profond apparaît dans une dimension du système avant de se propager comme dans un jeu de domino au reste du monde est tout à fait légitime.
 
Selon une définition de référence, proposée par Michel AGLETTA et P.MOUTOT, le risque de système désigne « l’éventualité qu’apparaissent des états économiques dans lesquels les réponses rationnelles des agents individuels aux risques qu’ils perçoivent, loin de conduire à une meilleure répartition des risques par diversification, amène à élever l’insécurité générale. »
 
Selon les auteurs, cette définition permet d’insister sur la non neutralité des structures financières, lesquelles influencent le champ des possibles en matière d’équilibre macroéconomique. Autrement dit, de graves dysfonctionnements dans l’allocation des ressources financières (par exemple, l’octroi de crédits à des ménages peu solvables avec le « subprime »...) peuvent conduire à des équilibres macréconomiques inefficients. Mais ces équilibres ne proviennent pas (seulement) l’irrationalité des agents, mais surtout des défauts de la coordination de milliers de choix individuels (microéconomiques) par les marchés financiers. D’où un résultat macroéconomique « anormal ».
 
Mais il faut convenir que dans un système économique dynamique on observe « naturellement » un processus permanent de destruction-créatrice d’activité, d’entreprise, d’emplois, dans lequel des risques sont régulièrement pris par les uns (avec le concours volontaire ou involontaire des autres) et cette situation ne peut se traduire que par une certaine dose d’instabilité. En effet, un système dynamique, par nature, ne peut se reproduire à l’identique.
 
Les risques pris étant fondés simultanément sur des choix plus ou moins rationnels et sur la confiance (facteur irrationnel) en l’avenir (par nature incertain) de ceux qui prennent des paris, les effets qui en résultent peuvent être un puissant facteur d’instabilité, en raison des successions de phases de réussite (pour certains) et d’échecs (pour d’autres).
 
Le risque de crise systémique est donc inhérent à une économie capitaliste de marché. Il n’est donc aucunement surprenant de s’interroger sur les conséquences réelles potentielles de la crise financière actuelle, laquelle a l’instar des crises du passé pourrait provoquer bien plus de dégâts qu’elle n’en a déjà causé.
 
L’avenir ne se conjugue pas au passé
 
Cela étant, ce n’est pas parce que le pire est possible qu’il est probable. Les leçons de l’histoire des crises financières nous permettent de penser que notre avenir reste entre nos mains, ou plutôt entre celles de ceux qui dirigent nos économies nationales, régionales et internationales. Seuls le fatalisme et la résignation devant un avenir qui serait déjà écrit, parce qu’inscrit de manière inéluctable dans les erreurs du passé, pourraient nous faire répéter les mêmes erreurs.
 
L’avenir nous dira ce qu’il en fut de la crise actuelle. Mais en « attendant » l’avenir, c'est-à-dire en faisant feu de tout bois pour qu’il soit le meilleur possible, regardons rapidement comment nous en sommes arrivés là et essayons de comprendre quels sont les principaux ressorts de cette crise compte tenu de la situation de l’économie mondiale aujourd’hui et donc du potentiel de sortie de crise.
 
De la bulle Internet en 2000 à la bulle immobilière
 
« Le cycle amorcé depuis l’éclatement de la bulle Internet se démarque des cycles économiques habituels. La croissance ne se heurte pas à la loi des rendements décroissants qui voudrait que les sources de création de richesse viennent à se tarir. Elle ne bute pas non plus sur les tensions de tel ou tel marché qui obligeraient à calmer le jeu. Elle ne s’étouffe pas dans un surinvestissement qui conduirait à l’accumulation de capacités de production excédentaires et nécessiterait un ajustement brutal pour ramener chacun à la raison. Opérant sur un espace globalisé, appuyée à grande échelle par une finance triomphante, la logique de la croissance actuelle semble défier la raison. L’accès à l’économie de marché d’une moitié de l’humanité est une aventure fascinante. » OFCE Prévision Avril 2007.
 
L’histoire récente de l’économie mondiale nous montreque la croissance mondiale a plutôt bien résisté à l’instabilité géopolitique et à la flambée des cours du pétrole depuis le krak de la « nouvelle économie », c'est-à-dire le dégonflement de la bulle Internet des années 2000. En 2006 la croissance mondiale fut de 5,1 % de croissance.
 
Mais le retournement du marché immobilier américain va-t-il sonner la fin de cet « âge d’or » de la croissance économique mondiale ? Au minimum, il pourrait déclencher une récession (soit un ralentissement) avec un taux de croissance du PIB mondial d’environ 4,5 % en 2007 et 2008.
 
La crise du « subprime »
 
La crise du « subprime » est déjà à l’origine de nombreuses faillites et nourrit l’incertitude. Le terme "subprime" désigne des crédits hypothécaires à risque aux Etats-Unis. Les défaillances d'organisme de crédit immobilier se multiplient dans ce pays. Plusieurs dizaines d'organismes de crédit immobilier ont fermé leurs portes. D’autres ont remonté leurs exigences en matière de prêts pour s’adapter à la baisse des prix de l'immobilier résidentiel et à la hausse du coût du crédit, alors que et que le nombre des défaillances augmentait.
 
La crise des prêts immobiliers à risque américains, d'abord circonscrite au marché américain, s'est propagée à d’autres économies. Elle  touche des banques australienne, britannique, et allemande. En France, Natixis (alliance des Banques Populaires et de la Caisse d'Epargne), la banque d'affaires des Banques Populaires, serait plus exposée que ses concurrents au marché de la titrisation constitué en partie par le « subprime ». BNP Paribas a gelé trois fonds de placement composés de titres adossés à des créances immobilières après avoir annoncé que « disparition de toute transaction sur certains segments du marché de la titrisation aux Etats-Unis a conduit à une absence de prix de référence et à une illiquidité quasi-totale des actifs figurant dans les portefeuilles des fonds quelle que soit leur qualité ou leur rating. » BNP Paribas reconnaît qu'elle ne peut plus établir une juste valorisation des actifs contenus dans ces fonds, ce qui la pousse à suspendre ses fonds.
 
Subprime et LBO
 
L’autre problème, en France, provient des LBO. Les « Leverage BuyOut »  présentent des similitudes avec les crédits « subprime ». En effet, les LBO sont des crédits utilisés pour des opérations de rachat par endettement. Le marché du LBO est élément moteur du marché mondial des fusions et acquisitions et outil très prisé par les fonds d'investissement, a représenté un montant de 600 milliards de dollars en 2006. Cela pourrait susciter des inquiétudes concernant la stabilité financière dans le cas d'un retournement du cycle des crédits. Mais, les acteurs du marché des LBO se connaîtraient beaucoup mieux que ceux des « subprime. Ils pourraient donc se protéger collectivement contre les défaillances passagères.  Cela étant, l'observation du marché du « subprime » illustre comment le marché des « leverage loans » pourrait évoluer en cas d'un affaiblissement du marché du crédit.
 
Donc, la situation des banques internationales se dégrade et les conséquences se propagent au reste de l’économie. Pourtant, le scénario du pire n’est peut-être pas encore à nos portes. En effet, le dynamisme des économies asiatiques et la vigueur retrouvée de la zone euro pourraient prendre le relais de la croissance américaine en tant que « locomotive » de la croissance mondiale et venir compenser le ralentissement américain, lequel  pourrait peser sur la croissance mondiale.
 
A suivre...,
 
 
... avec un prochain billet sur l'importance du contexte macroéconomique international...
 
 
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